MÉDITATION SUR L’ÉPIPHANIE
Nous avons vu l’Étoile… et nous sommes venus.
0 mon Dieu, dans vos rapports avec nous, vous nous prévenez nécessairement toujours. Aussi, saint Jean pu écrire : « Aimons-le donc, puisqu’il nous a aimés le premier. » (I Jean., 4, 19). Vous venez, et nous allons à vous. Ce qui s’est passé pour les Mages arrive à chacun de nous. Imitons-les. 1° Ils ont vu l’étoile, 2° Ils l’ont suivie.
1° Ils ont vu l’étoile
— Pour ces sages, il y eut un phénomène miraculeux, pour toute âme, sans rien d’extraordinaire, existe le phénomène. Chacun a son étoile. Ne dit-on pas que d’aucuns « sont nés sous une bonne étoile ». En cette affirmation, quelque peu païenne, on peut découvrir un sens surnaturel.
Le besoin de vérité ne peut quitter l’âme humaine, puisqu’elle vit de lumière, « Et la lumière était la vie des hommes. » (Joan., 1, 4). Les modernes philosophes ne sont pas plus heureux que leurs devanciers, et pour les mêmes raisons. Éloignons-nous d’eux.
Intense doit être notre soif de savoir, de voir, impérieux s’impose, par suite, le devoir de chercher, d’élever no$ pensées, de nourrir notre intelligence, d’augmenter in science spirituelle. Mais nous savons, et sans hésitation où est la source. Regardons l’Étoile.
Aux êtres intelligents ne fait jamais défaut, selon une mesure providentielle, l’illumination d’en-haut, et celle-ci est certes toujours bonne. Dieu n’éclaire que pour vivifier. Ne discutons pas la question des prédestinations. Devant les faveurs départies à ceux-ci, refusées à ceux-là, nous sommes en présence d’un problème dont la solution ne sera claire qu’au ciel.
Admettons que Celui qui veut le salut de tous, devant les yeux de tous fait briller l’astre conducteur, grâce auquel sera tracée la bonne route. L’important est de regarder, de bien voir ; c’est la condition pour que l’étoile soit bonne, car, de fait, il n’en est pas de mauvaise en soi.
Ainsi fut l’étoile brillant au-dessus de nos têtes, appel intime de Dieu à suivre la voie de la perfection chrétienne : vision d’un idéal à poursuivre, d’une beauté à réaliser, d’un bonheur à atteindre. Nous avons vu très clair, un jour, et nous nous sommes décidés à suivre la lumière entrevue. Et il n’y eut pas d’éclipsé en cette vision, d’interruption en cet appel, si nous sommes restés dans les dispositions voulues.
L’étoile des Mages disparut au-dessus de Jérusalem, la ville où régnaient tous les vices. Elle reparut à la sortie. Pour briller dans une âme, l’étoile exige une atmosphère pure, un ciel où l’azur est libre. « Nous avons vu l’étoile », parce que les yeux, le cœur se portaient en haut, sans que rien ne les inclinât vers ce qui est en bas.
O Jésus, je vous adresse la prière des aveugles : « Faites que je voie ». Vous m’exaucerez sûrement à condition que moi-même, je veuille être exaucé. C’est pourquoi j’ajoute avec tout mon cœur : « Détournez mes yeux de la vanité. »(Ps., 118, 37). L’écran étant supprimé, je verrai.
2° Ils l’ont suivie.
— Du côté de Dieu l’étoile est toujours bonne ; du côté de l’âme, elle ne le sera que selon le mode de sa correspondance à la lumière reçue. Il dépend de notre liberté d’être sous la bonne étoile.
Les Mages n’ont pas hésité devant les sacrifices nombreux que leur imposait leur décision de suivre le météore. « Nous sommes venus » disent-ils sans phrase ; ils ont vu, ils sont partis. Saint Thomas, méditant ce fait, écrit :
« Il faut remarquer que le désir fervent de l’amour de Dieu ne permet « pas à l’âme de rester en repos tant qu’elle n’a pas trouvé le bien-aimé. Plus le désir est ardent, plus intense est la joie quand il est satisfait. Les Mages désiraient le Christ avec très grande ferveur, ils le trouvèrent avec une immense délectation. » L’évangile nous dit, en effet, « qu’ils se réjouirent d’une grande joie. »
Quant, à la preuve de ce nécessaire fervent, désir, saint Augustin nous la suggère :
« 0 âme, voici les marques authentiquant tes aspirations : d’abord, demande la lumière afin que les ténèbres ne t’embarrassent pas ; ensuite, interroge ceux qui savent, pour que tu ne te trompes pas ; enfin, ne t’arrête nulle part jusqu’à ce que tu aies trouvé l’Aimé.»
En somme : prière, méditation, générosité ; le programme est bon, la leçon précise.
O Jésus, de combien de grâces ne me suis-je pas privé par mon défaut d’attention, mon manque de volonté. Imposez-vous à mon esprit, subjuguez mon cœur, mais que désormais je sois diligent dans ma marche à l’étoile.
Mgr Augustin Conon +, Stella matutina