Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Allez, enseignez.

Allez, enseignez.

VENDREDI DE PÂQUES

Allez enseignez toutes les nations église de Bretteville sur Ay
Allez enseignez toutes les nations église de Bretteville sur Ay

Elle est magnifique et touchante cette scène de la dernière rencontre du Christ avec ses apôtres, sur cette montagne de Galilée où il leur donna rendez-vous avant de remonter à son Père. Est-ce sur le Thabor, sur le « mont des béatitudes », on n’est pas fixé.

Assez proba­blement c’était près du lac : l’horizon était large. Plus large encore, celui que le Maître découvre aux regards des siens qu’il investit là de leur mission. De celle-ci, dans les quelques lignes qui rapportent l’épisode, nous trouvons : 1° Le point d’appui, 2° L’objet, 3° L’assurance.

1° Le point d’appui. — Solennelle est la formule employée par Jésus : « Toute puissance m’a été donnée au ciel et sur terre ; allez donc, enseignez ! » (Matt., 28, 18). C’est parce que son Père l’a envoyé, doté de tous ses pouvoirs, qu’il a accompli son œuvre. Rien ne pouvait le faire trembler, ni l’arrêter, revêtu qu’il était de « toute-puissance », délégué officiel, sûr ainsi de l’assistance d’en-haut.

Voilà notre force. Nous ne nous ingérons pas dans l’œuvre de Dieu. Appelés à l’apostolat n’avons-nous pas reçu nous-mêmes, d’une certaine manière, la parole du Christ ? Nous sommes appuyés au roc inébranlable de la volonté divine qui nous a placés où nous sommes. Notre force, c’est notre désir de bien faire et notre obéis­sance.

Seigneur, quand j’ai pris la résolution d’être apôtre, je me suis mis entre vos mains. Parce que je ne m’en suis pas détaché, je suis tranquille.

2° L’objet. — Il est précisé : « Allez, enseignez », c’est l’enseignement. Nous sommes envoyés pour cela ; notre apostolat porte surtout sur ce point. L’Église a reçu de Jésus-Christ la mission d’enseigner et elle nous demande d’aider ses prêtres quand l’ignorance religieuse est si répandue, quand il s’agit de rappeler à tant d’âmes, même chrétiennes, les grandes vérités de la foi.

La foi est la base de tout et « la foi s’acquiert par l’enseignement entendu». Saint Paul y insiste : « Comment croira-t-on en Celui dont on n’a pas entendu parler ? Et comment en entendra-t-on parler s’il n’y a pas de prédicateurs, pas d’enseignants ? » (Rom., 10, 14).

Nous ne nous’ persua­derons jamais assez de l’importance capitale de ces fonc­tions d’instituteurs du peuple. Tout notre labeur doit graviter autour de cette obligation, d’instruire. Toutes nos œuvres ne doivent avoir d’autre but que de nous permettre de la remplir.

Seigneur, vous qui êtes la grande Parole, quelle grâce vous m’avez faite en me constituant votre écho : « qui vous écoute m’écoute », Faites que je prenne exactement le ton, bénissez mon travail intellectuel afin que je sois un lumineux semeur de votre divine parole.

3° L’assurance. — Le mandat que nous avons reçu ne nous met pas à l’abri de nombreuses difficultés. Semée d’embûches est notre route ; semeurs de vérité nous lut­tons contre le « prince des ténèbres », qui durement nous poursuit de ses attaques. Si nous sommes tremblants, si nous nous sentons faiblir, nous nous réconforterons en songeant que nous ne sommes pas seuls.

Écoutons encore saint Jérôme : « Celui qui promit à ses disciples de ne jamais les quitter, leur promit la victoire, et il assura de sa pré­sence ceux qui croiront en lui ». Impossible d’avoir meil­leure assurance. Allons donc toujours devant nous en dépit des secousses et des coups ; Jésus a eu le dernier mot ; parce qu’il est là, nous l’aurons avec lui.

Bon Maître, mon cœur se dilate en pensant à la réalité de votre présence. Fort de cette pensée que j’accomplis votre sainte volonté, je marcherai tranquille : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut, qui craindrais-je ? » (Ps., 26,1),

Ils ont enlevé mon Seigneur et je ne sais où ils l’ont mis.

Ils ont enlevé mon Seigneur et je ne sais où ils l’ont mis.

JEUDI DE PÂQUES

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Marie-Madeleine-au-tombeau St Plogonnec

Alors que les apôtres sont partis, Marie-Madeleine, au cœur plus ardent, est revenue près du tombeau vide. Elle est malheureuse, exhalant sa plainte, aux anges d’abord, ensuite au bon Maître lui-même qu’elle ne recon­naît pas immédiatement. 1° On perd Jésus, 2° On retrouve Jésus.

1° On perd Jésus. — Madeleine avait assisté à la mort du Sauveur avec une âme déchirée ; elle l’avait, sans doute, vu mettre dans le sépulcre et 13, en ce matin de Pâques où avant le jour la ramène son amour, elle ne le voit plus ; la pierre est enlevée, le corps a disparu. Il ne reste pas même cette assurance d’une présence à laquelle sont rivées toutes ses puissances. Grande est sa déso­lation.

Voilà l’image d’une très dure épreuve de la vie spiri­tuelle : le sentiment que Jésus n’est pas là.

Cette âme fut généreuse ; elle a assisté à la passion, c’est-à-dire, qu’elle a consenti aux immolations imposées par un amour sincère, un service loyal ; elle a réalisé l’abneget semetipsum, le renoncement, le tollat crucem suam, elle porte sa croix (Matt., 16, 24), entraînée qu’elle était par sa ferveur, la joie intime du sacrifice, la paix du devoir accompli.

Et tout disparaît ; c’est la nuit, le vide, l’angoisse, l’anxiété, le doute. Elle souffre durement.

Qu’elle soit patiente et confiante, un merveilleux travail s’opère ainsi en’ elle. Le but de tout c’est l’union à Dieu ; or, le moindre atome d’humain est obstacle à la plénitude de cette union, la plus petite complaisance s’y oppose. Lorsque providentiellement, plus rien ne retient, n’arrête les facultés, on est apte au total investissement du divin : « Ne me touche pas, je ne suis pas encore remonté à mon Père. » (Joan., 20, 17).

Le moment présent n’est pas celui des joies, elles sont réservées pour plus tard. Sachons attendre, et il y aura toujours des heures de clartés passa­gères, mais suffisamment rassurantes.

Seigneur, ne sont-elles pas fréquentes en ma vie, les journées sombres et froides ? Fiat ! J’accepte tout ce que vous voulez. Travaillez-moi à votre gré, mais que je n’aie pas l’affreux malheur de vous perdre jamais réellement.

2° On retrouve Jésus. — Marie a fini par revoir Celui qu’elle cherchait ; saint Grégoire nous dit pourquoi : «L’ardeur de l’amour augmente celle de la recherche. Elle chercha, d’abord sans trouver. Elle s’obstina, et elle réussit. Ses désirs insatisfaits s’augmentaient, et leur intensité les fit aboutir. »

Parfaite indication des attitudes que doit adopter l’âme éprouvée. Quelle cherche avec empressement, avec obstination, avec amour.

Avec empressement : Madeleine est là avant le jour ; soyons vigilants, diligents, dans notre orientation vers Jésus. Qu’il soit notre première, notre instinctive, notre principale préoccupation : « Mon Dieu, mon Dieu, je vous cherche dès l’aurore. » (Ps., 62, 2).

Avec obstination : la vraie vie intérieure d’union à Dieu ne se réalisé pas en un jour ; c’est un travail de longue haleine, on y consacre tout son temps, sans interruption qui risquerait de faire perdre le bénéfice des efforts pré­cédents. D’ailleurs, jamais ne cessent de jouer les motifs péremptoires d’acquérir, de développer cette union.

Avec amour : tout est conditionné par la charité ; il n’en peut être autrement, « Dieu est charité » (1 Joan., 4,8), on ne va à lui qu’en s’harmonisant sur lui, qu’en obéis­sant au précepte résumant tous les autres : Tu aimeras ! Sans l’amour, il ne paraît pas possible de soutenir le labeur imposé : « Vous n’avez point reçu un esprit de servitude pour être encore dans la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d’adoption. » (Rom., 8, 15).

Seigneur, je suis à vous, je veux être à vous de plus en plus ; je vous appellerai partout ; répondez-moi en m’appelant à votre tour, comme vous l’avez fait pour Made­leine, par mon nom ; je saurai vous répondre : Rabboni ! « Maître ! »

MgrAugustin Gonon, évêque de Moulins (+14 avril 1942)

EUCHARISTIE MÉDITÉE 4

EUCHARISTIE MÉDITÉE 4

Le Père du prodigue

Mon fils était mort, et il est ressuscité ; il était perdu, et il est retrouvé. (Luc, XV 24)

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

4e Action de grâces – pour nous le plus tendre des pères.

Vous êtes à moi, mon Dieu, vous m’enveloppez de votre amour comme d’une atmosphère de bonheur ; je repose sur votre cœur et vous sens vivre tout auprès du mien. Pourquoi, Seigneur, tant de bonté, tant d’amour ? Ah ! si votre miséricorde l’oublie, mon cœur ne l’oubliera jamais.

Vous êtes le Saint des saints, la sainteté même, la pureté par essence, et moi je ne suis, hélas ! qu’une personne marquée par le péché, qu’une cendre impure que le souffle de votre grâce a purifiée, que votre sang a lavée de sa souillure originelle ; je suis enfin cet enfant prodigue qui a dissipé loin de vous tous les biens qu’il tenait de votre libéralité.

Oui, mon Dieu, je le confesse à vos pieds, tout a été pour moi une occasion de chute : je ne me suis servi de vos bienfaits que pour vous outrager, et vos dons mêmes ont été la source de mes fautes. Que d’erreurs ont obscurci ma raison ! que de fantômes impurs ont souillé mon imagination !

A combien de pensées vaines, frivoles et souvent dangereuses mon esprit ne s’est-il pas livré ! Combien de fois surtout mon cœur ne s’est-il-pas partagé entre vous et les créatures ! Hélas ! j’ai divisé entre vous et elles cet amour dont vous deviez être le seul objet, et je l’ai souillé, ce pauvre cœur, par mille affections trop humaines et trop naturelles.

J’avoue toutes ces fautes, toutes ces erreurs à vos pieds, ô mon Dieu, je les confesse en votre présence, et cette confession, tout en me couvrant de confusion, en m’inspirant le plus sincère repentir, n’altère pas ma confiance ; car si je fus et suis encore si coupable, vous êtes miséricordieux et vous êtes mon Père.

J’ai péché, il est vrai, mais je pleure ; je fus ingrat, mais je vous aime, et je sais que le repentir et l’amour couvrent à vos yeux la multitude de mes iniquités.

Je sais encore, Seigneur, que vous n’êtes venu à moi que pour m’apporter le pardon et le salut, que vous êtes mon Sauveur et mon Père avant d’être mon juge, et qu’il vous est plus doux d’exercer la miséricorde que la justice.

Exercez-la donc sur moi dans toute son étendue, celte miséricorde, ô mon Dieu ; qu’elle me pardonne le passé et me préserve pour l’avenir ; que votre grâce soit ma force au moment du péril et de l’épreuve ; que votre cœur soit en tout temps mon refuge et mon asile.

Mais en implorant votre miséricorde pour moi, ô mon Dieu, souffrez que je la sollicite aussi pour ceux de mes frères qui s’égarent et qui s’éloignent de vous. Permettez, o Jésus, que je vous répète en leur faveur ces paroles adorables que du haut de la croix vous adressâtes à votre Père pour ceux qui vous y avaient attaché : Mon Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font.

Hélas ! vous le voyez, Seigneur, ils sont encore plus malheureux que coupables; soyez touché de compassion, que vos entrailles paternelles s’émeuvent pour eux ; regardez-les de loin, voyez leur épuisement et leur misère, allez à eux s’ils ne veulent pas venir à vous; jetez à leurs cœurs affamés l’aliment de votre amour, et ne vous vengez d’eux qu’eu les forçant à vous aimer.

Et vous, ô Vierge sainte, vous qui n’avez jamais eu besoin de miséricorde, mais qui l’avez donnée au monde en lui donnant Jésus, le fruit béni de votre chaste sein, vous qu’on appelle à juste titre l’espérance de ceux qui n’en ont plus, le refuge du pauvre pécheur, ah ! ouvrez-nous à tous votre cœur et vos bras maternels, soyez notre ville de refuge, faites-vous notre avocate, cachez-nous sous le manteau de votre charité.

Vous êtes la Mère du juste et du pécheur ; mais souvenez-vous que, si l’un a plus de droits à votre amour, l’autre en a davantage à votre compassion. Oh ! plaidez sa cause, arrêtez le glaive de l’éternelle justice suspendu sur sa tête, réclamez-le comme votre enfant, comme la part de votre héritage, comme un frère faible et malheureux que Jésus, votre divin Fils, a confié en mourant à votre sollicitude et à votre amour.

Et obtenez-lui enfin cette grâce puissante qui touche et qui convertit, ces larmes qui purifient, ce repentir et cet amour qui des plus grands pécheurs peuvent faire les plus grands saints. Ainsi soit-il.

Léonie Guillebaut