Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Quand tout est ennuyeux et dénué de sens, la « patience de la foi » nous sauve

Quand tout est ennuyeux et dénué de sens, la «patience de la foi» nous sauve

La paresse est le vice sur lequel le Pape nous invite à réfléchir lors de l’audience générale dans la salle Paul VI. « Une tentation très dangereuse » qui inspire presque « un souhait de mort ». Lorsqu’il attaque, il faut y répondre avec « une moindre mesure d’engagement », mais avec de la persévérance « en s’appuyant sur Jésus »

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI
Mercredi 14 février 2024

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Catéchèse – Les vices et les vertus – 8. L’acédie

Chers frères et sœurs, bonjour !

Parmi les vices capitaux, il en est un qui est souvent négligé, peut-être à cause de son nom que beaucoup ne comprennent pas : Je parle de l’acédie. C’est pourquoi, dans le catalogue des vices, le terme acédie est souvent remplacé par un autre beaucoup plus usité : la paresse.

En réalité, la paresse est plus un effet qu’une cause. Lorsqu’une personne est oisive, indolente, apathique, nous disons qu’elle est paresseuse. Mais, comme l’enseigne la sagesse des anciens pères du désert, souvent la racine de cette paresse est l’acédie, qui signifie littéralement, en grec, « manque de soin ».

C’est une tentation très dangereuse qu’il ne faut pas prendre à la légère. La personne qui en est victime est comme écrasée par une pulsion de mort : elle éprouve du dégoût pour tout, sa relation avec Dieu lui paraît ennuyeuse, et même les actes les plus saints, ceux qui dans le passé lui avaient réchauffé le cœur, lui semblent désormais tout à fait inutiles.

La personne commence à regretter le temps qui passe et la jeunesse qui est irrémédiablement derrière elle.

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L’acédie est définie comme le « démon de midi » : elle nous surprend au milieu de la journée, lorsque la fatigue est à son comble et que les heures à venir semblent monotones, impossibles à vivre. Dans une description célèbre, le moine Évagre représente ainsi cette tentation :

« l’œil de celui qui est sous l’acédie cherche continuellement les fenêtres, et son esprit fantastique est habité de ses visiteurs. […] Quand il lit, celui qui est sous l’acédie bâille souvent et se laisse facilement gagner par le sommeil, il plisse les yeux, se frotte les mains et, détournant les yeux du livre, fixe le mur ; puis, les tournant à nouveau vers le livre, il lit encore un peu […] ; enfin, baissant la tête, il dépose le livre en dessous, s’endort d’un sommeil léger, jusqu’à ce que la faim le réveille et le pousse à s’occuper de ses besoins » ; en conclusion, « celui qui est sous l’acédie n’accomplit pas avec sollicitude l’œuvre de Dieu » (Évagre le Pontique, Traité des huit esprits de malice, 14).

Les lecteurs contemporains voient dans ces descriptions quelque chose qui rappelle beaucoup le mal de la dépression, tant d’un point de vue psychologique que philosophique. En effet, pour ceux qui sont saisis par l’acédie, la vie perd son sens, prier devient ennuyeux, toute bataille semble dénuée de sens.

Même si nous avions nourri des passions dans la jeunesse, elles nous paraissent aujourd’hui illogiques, des rêves qui ne nous ont pas rendus heureux. Alors on se laisse aller et la distraction, l’absence de pensée, apparaissent comme la seule issue : on aimerait être hébété, avoir l’esprit complètement vide… C’est un peu comme mourir par anticipation, et c’est déplorable.

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Face à ce vice que l’on sait si dangereux, les maîtres de la spiritualité envisagent divers remèdes. Je voudrais signaler celui qui me semble le plus important et que j’appellerais la patience de la foi. Si, sous le fouet de l’acédie, le désir de l’homme est d’être « ailleurs », de fuir la réalité, il faut au contraire avoir le courage de rester et d’accueillir dans mon « ici et maintenant », dans ma situation telle qu’elle est, la présence de Dieu.

Les moines disent que la cellule est pour eux le meilleur maître de vie, parce qu’elle est le lieu qui te parle concrètement et quotidiennement de ton histoire d’amour avec le Seigneur. Le démon de l’acédie veut détruire précisément cette joie simple de l’ici et maintenant, cette crainte reconnaissante de la réalité ; il veut te faire croire que tout est vain, que rien n’a de sens, qu’il ne vaut pas la peine de se préoccuper de rien ni de personne.

Dans la vie, nous rencontrons des gens « sous l’emprise de l’acédie », des gens dont nous disons : « Mais qu’il est ennuyeux ! » et nous n’aimons pas être avec eux ; des personnes qui ont aussi une attitude d’ennui contagieuse. C’est l’acédie.

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Combien de personnes, sous l’emprise de l’acédie, mues par une inquiétude sans visage, ont stupidement abandonné le chemin du bien qu’elles avaient emprunté ! L’acédie est une bataille décisive, qu’il faut gagner à tout prix. Et c’est une bataille qui n’a pas épargné même les saints, parce que dans tant de leurs diaires, il y a quelques pages qui révèlent des moments terribles, de véritables nuits de la foi, où tout semblait obscur.

Ces saints et saintes nous enseignent à traverser la nuit dans la patience en acceptant la pauvreté de la foi. Ils nous ont recommandé, sous l’oppression de l’acédie, de tenir une plus petite mesure d’engagement, de nous fixer des objectifs plus accessibles, mais en même temps de résister et de persévérer en nous appuyant sur Jésus, qui jamais n’abandonne dans la tentation.

La foi, tourmentée par l’épreuve de l’acédie, ne perd pas sa valeur. Bien au contraire, c’est la vraie foi, la foi très humaine qui, malgré tout, malgré l’obscurité qui l’aveugle, croit encore humblement. C’est cette foi qui reste dans le cœur, comme les braises sous la cendre. Elle reste toujours.

Et si l’un de nous tombe dans ce vice ou dans la tentation de l’acédie, qu’il s’efforce de regarder à l’intérieur de soi et d’entretenir les braises de la foi : c’est ainsi que l’on va de l’avant.


Je salue cordialement les pèlerins de langue française venus de Belgique et de France, en particulier le groupe de jeunes du Diocèse de Créteil, accompagné par leur Évêque.

Je vous invite, au début de ce Carême, à combattre le vice de l’acédie par l’enthousiasme de la foi, confiants dans la présence puissante de Jésus en nous.

Que Dieu vous bénisse !


Résumé de la catéchèse du Saint-Père

Chers frères et sœurs,

Parmi tous les vices capitaux, il en est un peu connu : l’acédie. Ce mot, qui nous vient du grec, signifie le manque de soin pour la vie intérieure et conduit à l’indolence ou à la paresse spirituelle, jusqu’au dégoût. Il s’agit d’une tentation redoutable où le rapport avec Dieu devient ennuyeux, les actes de dévotions inutiles et la lutte contre nous-même privée de sens.

Sorte de « démon de midi » qui nous prend au moment, de la journée ou de la vie, où nous sommes le plus fatigués, l’acédie nous empêche d’accomplir nos tâches avec sollicitude ou passion ; elle nous conduit à laisser libre cours à la distraction ou au désir de ne penser à rien.

Devant ce péril redoutable pour la vie spirituelle, l’homme se doit de réagir par la patience de la foi, en accueillant la réalité de sa situation, toujours habitée par Jésus.


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Le Mercredi des Cendres, entrée du Carême

Le Mercredi des Cendres, entrée du Carême

En tant qu’associés de la Médaille Miraculeuse,

nous croyons que Pâques est le cœur même de la foi chrétienne. C’est pourquoi nous nous préparons à la fête de Pâques depuis le début du Carême, et en particulier tout au long de la Semaine Sainte.

Convertissez-vous et croyez à l'Evangile
Convertissez-vous et croyez à l’Évangile

Le Carême

Le Carême est un temps de préparation de quarante jours à la fête de Pâques, cœur de la foi chrétienne, qui célèbre la résurrection du Christ. Ces quarante jours  nous permettent de revivre avec le Christ au désert les quarante années de la marche des Hébreux vers la terre promise.

C’est la même expérience d’intimité avec Dieu que souhaite revivre toute la communauté des croyants baptisés ou candidats au baptême, alors qu’elle se met en route vers Pâques.

Le Carême commence le Mercredi des Cendres et s’achève le Jeudi Saint, avant la célébration de la Cène du Seigneur.

Le Mercredi des Cendres

le rappel des Cendres
le rappel des Cendres

Le Mercredi des Cendres, premier jour du Carême, est marqué par l’imposition des cendres : le prêtre dépose un peu de cendres sur le front de chaque fidèle, en signe de la fragilité de l’homme, mais aussi de l’espérance en la miséricorde de Dieu .

On trouve déjà le symbolisme des cendres dans l’Ancien Testament. Il évoque globalement la représentation du péché et la fragilité de l’être. On peut y lire que quand l’homme se recouvre de cendres, c’est qu’il veut montrer à Dieu qu’il reconnaît ses fautes. Par voie de conséquence, il demande à Dieu le pardon de ses péchés : il fait pénitence.

Un symbole de renaissance

Tous, nous faisons l’expérience du péché. Comment s’en dégager ? Jésus nous apprend que nous serons victorieux du péché quand nous aurons appris par l’Évangile à remplacer le feu du mal par le feu de l’Amour. Car le feu qui brûle ce jour détruit d’abord mais, en même temps, ce feu éclaire, réchauffe, réconforte, guide et encourage.

La cendre est appliquée sur le front pour nous appeler plus clairement encore à la conversion, précisément par le chemin de l’humilité. La cendre, c’est ce qui reste quand le feu a détruit la matière dont il s’est emparé. Quand on constate qu’il y a des cendres, c’est qu’apparemment il ne reste plus rien de ce que le feu a détruit. C’est l’image de notre pauvreté. Mais les cendres peuvent aussi fertiliser la terre et la vie peut renaître sous les cendres.

Tout en le marquant, le prêtre dit au fidèle : « Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». L’évangile de ce jour est un passage de saint Matthieu – chapitre 6, versets 1 à 6 et 16 à 18 – qui incite les fidèles à prier et agir, non pas de manière orgueilleuse et ostentatoire, mais dans le secret de leur cœur :

Quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que te donne ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père voit ce que tu fais en secret.

Quand tu pries, retire-toi au fond de ta maison, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret.

Quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ; ainsi ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement du Père qui est présent dans le secret.

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Texte présenté par l’Association de la Médaille Miraculeuse

Saints Cyrille et Méthode

Saints Cyrille et Méthode

Cyrille-Constantin et Méthode
Cyrille-Constantin et Méthode

Proclamés co-patrons de l’Europe en 1980 par saint Jean-Paul II, Cyrille et Méthode sont deux frères nés en Grèce à Thessalonique au début du IXe siècle. Tous deux sont moines en Asie mineure. Les saints frères Cyrille et Méthode, semblables aux apôtres, ont porté l’Évangile aux Slaves.

Il faut voir la vénération des deux frères grecs qui existe en Russie, dans l’Église orthodoxe et dans les régions où domine le rite byzantin slave. Et pas seulement à Moscou, même dans la lointaine Vladivostok, ainsi qu’à Odessa et dans d’autres lieux de moindre importance.

Grandes figures missionnaires, Cyrille et Méthode sont arrivés en l’an 863 dans la Grande Moravie, une vaste région qui s’étendait autour des deux côtés du fleuve Morava et descendait vers le sud à travers la Pannonie.

Ainsi débuta leur mission pour diffuser la foi chez les peuples slaves. En 863, Ratislav, roi de la Grande Moravie, demanda tout d’abord expressément au Pape, mais sans succès, et ensuite à l’empereur byzantin Michel III, « un évêque et maître qui nous explique la foi véritable dans notre langue slave ».

En 863, l’empereur de Byzance les envoie donc porter l’Évangile en Moravie. L’annonce de la foi dans la langue connue par la population fut le point clef de la réussite missionnaire ou de son insuccès, comme elle l’est encore aujourd’hui.

Constantin et Méthode acceptèrent l’invitation à se rendre en mission, mais tout d’abord ils se préparèrent de manière appliquée et intelligente : pour accomplir leur tâche, ils traduisent les livres de la Bible et de la Liturgie dans la langue que les populations slaves comprenaient.

Ils se font linguistes afin de créer un alphabet car le « slavon » n’était qu’une langue orale. Étant donné que l’alphabet grec ne pouvait pas bien exprimer tous les sons de cette langue, ils inventèrent également l’alphabet appelé « glagolitique ».

Cyrille sera le principal artisan de cet alphabet de 38 lettres dont on tirera plus tard le cyrillique, bientôt adopté en Russie, Serbie et Bulgarie. Le Slavon demeure la langue liturgique des Églises de rite byzantin.

Ce fut un coup de génie des deux frères que d’utiliser cette méthode d’évangélisation inculturée. Pour réussir cette œuvre d’inculturation, les deux missionnaires devront venir se défendre à Rome, où on les accusait d’être hérétiques. Ils obtiendront la confiance des Papes, comme Hadrien II. Cyrille termina sa vie à Rome en 869, Méthode en Moravie en 885.

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Angélus de Jean-Paul II, le dimanche 15 février 2004 et
Audience Générale de Benoît XVI, le 17 juin 2009,
sur Cyrille et Méthode –> page 2