Tous les articles par P. Jean-Daniel Planchot

Je vous salue, Marie

Aujourd’hui samedi, il est bon, en tant qu’associés de la Médaille Miraculeuse, d’honorer notre Sainte Mère en méditant sur le « Je vous salue, Marie », initié lors de l’Annonciation que nous allons célébrer liturgiquement le 25 de ce mois de mars.

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Annonciation Andrea del Sarto (1486-1531) Tampera sur boisParmi toute cette provision de formules, dont l’Église prend soin de munir ses chrétiens pour les aider dans leurs prières, s’il en est une qui a servi beaucoup plus que les autres, c’est le « Je vous salue, Marie ».

Il y a aussi le « Notre Père » et les deux prières sont si bien ajustées l’une à l’autre, qu’on les fait toujours aller ensemble.

Le « Notre Père » est une prière plus haute, plus noble, plus grande, et reste la plus belle de toutes les prières. Il n’y a même pas de comparaison à faire. Mais c’est aussi une prière tellement plus exigeante qu’il y faudrait l’âme même de Jésus-Christ pour la dire comme il faut. Nous y voilà, en effet, face à face avec Dieu, du premier coup, Dieu avec son ciel, sa gloire, sa volonté, son nom, et il est bien difficile d’en n’être pas intimidé. Souvent aussi nous avons tellement honte, il nous faudrait pour nous y trouver à l’aise un cœur pur et une âme droite, et cette bonne volonté dont nous ne sommes pas toujours très sûrs.

Le « Je vous salue, Marie » lui, est une prière sans condition :

• c’est la prière des enfants sur lesquels on ne peut pas trop compter,
• c’est la prière du pauvre qui sait bien qu’il n’a rien à donner,
• c’est la prière du pécheur qui ne sait pas trop à qui s’adresser,
• c’est la prière de la joie parce qu’elle est facile et simple,
• c’est la prière aussi de la souffrance et de la peine parce qu’on parle à la mère qui console et apaise, et cette mère-là a tant supporté et tant souffert.

On trouve le « Je vous salue, Marie » sur les lèvres de l’enfant qui prie. Mais c’est aussi la prière qu’il faut faire à l’heure de notre mort.

Rien d’étonnant que ce soit la prière qui ait le plus servi.

C’est sans doute à tant servir que ces mots de prières, à la longue, semblent s’être usés, si bien qu’on en vient à les dire machinalement, par habitude, à plein chapelet, sans même plus comprendre ce qu’ils signifient. Il faut donc, de temps en temps, reprendre un à un chacun de ces mots pour les nettoyer de toutes ces habitudes, de ces accoutumances et de ces routines, afin d’y redécouvrir, émerveillé, ce son unique et imprévu, qui en fait une si belle prière.

G. Brossard

La mondanité nous rend aveugles…

… aux pauvres et à leur douleur

05-03-2015 source : Radio Vatican

La mondanité assombrit l’âme, nous rendant incapable de voir les pauvres qui vivent à nos côtés avec toutes leurs douleurs : c’est le message développé ce jeudi matin par le Pape François dans l’homélie de la messe célébrée en la chapelle de la maison Sainte-Marthe.

Commentant la parabole du mauvais riche, un homme vêtu « de pourpre et de fin lin » qui  « chaque jour menait une joyeuse et brillante vie », le Pape constate qu’on dit de lui qu’il était méchant : en fait, « peut-être était-ce un homme religieux, à sa façon. Peut-être priait-il deux ou trois fois par an, il se rendait sûrement au temple pour faire des sacrifices et donnait de belles offrandes aux prêtres, et ces derniers, avec leur pusillanimité cléricale, le remerciaient et le faisaient asseoir à la place d’honneur ». Mais il ne se rendait pas compte qu’à sa porte, il y avait un mendiant, Lazare, avec tant de douleurs, « symboles de tout ce dont il nécessitait ».

« Lorsqu’il sortait de chez lui, peut-être que la voiture avec laquelle il sortait avait des vitres teintées pour ne pas voir dehors, peut-être, je ne sais pas… Mais il est sûr que son âme, les yeux de son âme étaient assombris pour ne pas voir.  Il voyait seulement sa vie et ne se rendait pas compte de ce qu’il était arrivé à cet homme, qui n’était pas méchant : il était malade. Malade de mondanité. Et la mondanité transforme les âmes, fait perdre la conscience de la réalité : ils vivent dans un monde artificiel, construit par eux. La mondanité anesthésie l’âme. C’est pour cela que cet homme mondain n’était pas capable de voir la réalité ».

« Il s’agit de la réalité de nombreux pauvres qui vivent à nos côtésDe nombreuses personnes vivent une vie difficile, mais si j’ai un cœur mondain, je ne le comprendrai jamais. Avec un cœur mondain, on ne peut pas comprendre la nécessité et le besoin des autres. Avec un cœur mondain, on peut se rendre à l’église, on peut prier, on peut faire tant de choses. Mais Jésus, lors de la dernière cène, quelle était sa prière adressée au Père ? « S’il te plait, Père, protège ces disciples afin qu’ils ne tombent pas dans le monde, dans la mondanité ». C’est un péché subtil et plus qu’un péché : c’est un état d’âme pécheur ».

« Dans ces deux histoires  », il y a deux jugements : une malédiction pour l’homme qui fait confiance au monde et une bénédiction pour celui qui fait confiance au Seigneur. L’homme riche éloigne son cœur de Dieu : « son âme est déserte », c’est une « terre de salinité où personne ne peut vivre », « parce qu’à dire la vérité, les mondains sont seuls avec leur égoïsme ». « Son cœur est malade et tellement attaché à ce mode de vie que difficilement, il pouvait guérir ». En outre, lorsque le pauvre avait un nom, Lazare, le riche ne l’avait pas : « il n’avait pas de nom car les mondains perdent leur nom. Ils sont seulement une personne parmi la foule des gens aisés, qui n’ont besoin de rien. Les mondains perdent leur nom ».

Dans la parabole, l’homme riche, lorsqu’il meurt, se retrouve dans les tourments des enfers et demande à Abraham d’envoyer quelqu’un parmi les morts pour avertir sa famille encore en vie. Mais Abraham répond que s’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne se persuaderont pas, même si quelqu’un ressuscitait. Les mondains veulent des manifestations extraordinaires, même si « dans l’Église, tout est clair, Jésus a parlé clairement : c’est la voie. Mais, à la fin, il y a un mot de consolation ».

« Lorsque le pauvre homme mondain, dans les tourments, demande d’envoyer Lazare avec un peu d’eau pour l’aider, que répond Abraham? Abraham est la figure de Dieu, le Père. Que répond-il ? « Fils, souviens-toi… ». Les mondains ont perdu leur nom ; même nous, si nous avons un cœur mondain, nous perdons notre nom. Mais nous ne sommes pas orphelins. Jusqu’à la fin, jusqu’au dernier moment, nous pouvons être sûrs que nous avons un Père qui nous attend. Fions-nous à lui. Il nous appelle « fils », au milieu de cette mondanité. « Fils ». Nous ne sommes pas orphelins ».

Je prendrai soin de toi

05-03-2015 L’Osservatore Romano

La véritable mission de l’Église n’est pas de mettre au point une machine efficace d’aides, sur le modèle d’une ONG. Le profil de l’apôtre – qui annonce dans la simplicité et la pauvreté l’Évangile avec le seul véritable pouvoir qui vient de Dieu – se reconnaît en revanche dans l’expression claire de Jésus aux disciples rentrés heureux de la mission: « Nous sommes des serviteurs inutiles ». Et ainsi, le Pape, lors de la Messe célébrée le jeudi 5 février, dans la chapelle de la Maison Sainte-Marthe, a réaffirmé que la véritable « mission de l’Église est de guérir les blessures du cœur, ouvrir les portes, libérer, dire que Dieu est bon, pardonne tout, est père, Dieu est tendre et nous attend toujours ».

Dans le passage de l’évangile de Marc (6, 7-13), proposé par la liturgie, « nous avons entendu que Jésus appelle ses disciples » et les envoie « apporter l’Évangile: c’est lui qui les appelle ».

« L’Évangile est ainsi si riche et si fort qu’il n’a pas besoin de l’action de grandes entreprises pour être annoncé ». Parce que l’Évangile « doit être annoncé dans la pauvreté, et le véritable pasteur est celui qui va comme Jésus: pauvre, annoncer l’Évangile, avec ce pouvoir ».

Et « que commande-t-il de faire aux disciples, quel est son programme pastoral? ». Simplement celui de « soigner, guérir, élever, libérer, chasser les démons: c’est un programme simple ». Qui coïncide avec « la mission de l’Église: l’Église qui guérit, qui soigne ». Au point que « parfois, j’ai parlé de l’Église comme d’un hôpital de campagne: c’est vrai! Combien de blessés y a-t-il, combien de blessés! Combien de gens qui ont besoin que leurs blessures soient guéries! ».

Précisément la phrase adressée à Jésus par les disciples heureux, selon ce que rapporte l’Évangile, « nous explique tout ». Ils racontent: « Nous avons fait cela et cela, et cela… ». Ainsi, après les avoir écoutés, Jésus ferme les yeux et dit: « J’ai vu Satan tomber du ciel ». Une phrase qui révèle quelle est « la guerre de l’Église: c’est vrai, nous devons aider et créer des organisations qui aident, parce que le Seigneur nous donne des dons pour cela »; mais, « quand nous oublions cette mission, nous oublions la pauvreté, nous oublions le zèle apostolique et nous plaçons notre espérance dans ces moyens, l’Église glisse lentement vers une ONG et devient une belle organisation: puissante, mais non évangélique, parce que manquent cet esprit, cette pauvreté, cette force de guérison ».

Plus encore : à leur retour, Jésus emmène ses disciples « se reposer un peu, passer une journée à la campagne, en mangeant des sandwichs avec des boissons ». En somme, le Seigneur veut « passer ensemble un peu de temps pour faire la fête ». Et ensemble, ils parlent de la mission qui vient d’être accomplie. Mais Jésus ne leur dit pas « Vous êtes grands, hein! La prochaine sortie, à présent, organisez mieux les choses! ». Il se limite à leur dire: « Quand vous aurez fait tout ce que vous devez faire, dites-vous à vous-mêmes: « Nous sommes des serviteurs inutiles » » (Luc 17, 10). Dans ces paroles du Seigneur, il y a le profil de l’apôtre. En conclusion, le Pape a invité à lire ce passage de l’Évangile, en soulignant « quelles sont les choses les plus importantes pour Jésus, pour l’annonce de l’Évangile: ce sont celles-ci, ces petites vertus ». Et « ensuite, c’est lui, c’est l’Esprit Saint qui fait tout ».