Les Rameaux

L’entrée du Seigneur à Jérusalem

gloria laus | DR

Pendant cinq semaines, nous nous sommes préparés à célébrer le mystère pascal dont la « semaine sainte » marque le sommet. Le sixième dimanche de Carême est celui des Rameaux, qui commence la semaine Sainte. Il commémore l’entrée solennelle de Jésus à Jérusalem, quelques jours avant sa passion et sa mort sur la Croix.

Aujourd’hui, quand nous acclamons le Christ en rappelant son entrée à Jérusalem, sachons qu’il vient répondre à notre attente : lui seul comble le cœur de ceux qui le suivent, leur donne la vraie joie et la liberté, les introduit dans la cité nouvelle.

Ainsi le célébrant bénit les rameaux de l’assemblée et part en procession pour la messe. Les fidèles rapportent chez eux les rameaux bénits et en ornent les crucifix de leurs maisons.

Les éléments essentiels de la messe d’aujourd’hui existent depuis le IVe siècle. Tandis que Rome inaugurait ainsi la grande semaine en toute sobriété, l’église de Jérusalem invitait les pèlerins à participer à une procession  » mimant  » l’entrée triomphale du Christ à Jérusalem. Impressionnés par ces rites, les pèlerins de Gaule les introduisirent en Occident.

Théodulphe d’Orléans (+821) composa à cette occasion un premier texte : « Glória, laus et honor tibit sit, Rex Christe Redémptor : Cui puerile decus prompsit hosánna pium » ; « Gloire, louange, honneur à toi, Christ-Roi, Rédempteur, pour qui l’hommage des enfants fit jaillir un pieux Hosanna ».

« Tu es le roi d’Israël, l’illustre descendant de David. C’est au nom du Seigneur, roi béni, que tu viens. Les anges dans les cieux se rassemblent pour te chanter ; l’homme et tout l’univers s’unissent pour t’acclamer. Le peuple hébreu vient à ta rencontre avec des palmes, et nous, nous voici devant toi avec nos prières, nos vœux et nos hymnes. »

Suit la lecture de la Passion où l’on accompagne Jésus dans sa soumission filiale, accomplissant les Écritures. Aucun évangéliste plus que Matthieu n’a souligné la détresse de Jésus, le scandale de sa mort. Cette mort marque la fin d’un monde et l’avènement d’une ère nouvelle : le rideau du Temple se déchire et les tombeaux s’ouvrent, prélude à la résurrection finale et à la gloire de la nouvelle Jérusalem.

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D’après K. Rahner, Au miroir de l’année chrétienne :

Il y a deux mille ans, sous le règne de l’empereur Tibère, la croix a été dressée, quelques heures, aux portes de Jérusalem. Évènement d’un jour, objet de l’attente de tous les siècles. La croix révéla le but des longs millénaires qui la précèdent. C’est à la croix que doivent leurs énergies profondes les hommes de la préhistoire, les patriarches et toutes les générations. La longue caravane humaine, le coeur douloureux et les pieds en sang, d’abord inconsciente du terme de son voyage, trouve la folle sagesse du Maître de l’histoire suspendue au gibet.

Et durant les deux millénaires après le Christ, ne cesse de se reproduire ce qui arriva pendant ces trois heures, où le bois du Golgotha trouait le ciel de Jérusalem, et où l’homme qui y était attaché agonisait, frappé de solitude universelle, entre ciel et terre.

Vais-je me contenter de passer?

Après un regard distrait posé un instant sur l’homme cloué à cette potence, vais-je presser le pas? Cela ne m’intéresse pas. Et toute aide est vaine. – Ou bien vais-je m’arrêter… mais quant à faire de cette croix le pivot de ma vie, vous n’y pensez pas ! Car on peut, tout en portant la livrée et en faisant les gestes du chrétien, du bon chrétien, passer sans cesse devant la croix sans en faire la vérité la plus vraie de I’existence.

Et il arriva, en ce temps-là, que les foules qui marchaient devant Jésus et celles qui suivaient criaient « Hosanna au fils de David! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! » (Matthieu 21).

– Si tu te reconnais pécheur, viens l’acclamer. Tu l’as crucifié, ce sont tes péchés dont il s’est chargé. Mais voici que les bourreaux implorent leur victime, et que les coupables qui partagent son supplice lui disent « Seigneur, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton royaume » (Luc 23, 42). Tout cela n’est-il pas pour toi aussi ?

– Si tu souffres, viens l’acclamer. Est-il une détresse, si désespérée qu’elle soit, dont il n’ait partagé la nuit ? Est-il une souffrance guettée par la désespérance que n’adoucisse en rien le fait de savoir qu’elle a été supportée par le Fils de l’Homme, qui était aussi le Fils de Dieu ?

– Si tu es sans patrie, viens l’acclamer. Regarde cet homme qui fut rejeté par son propre peuple et trainé hors de la ville pour mourir au bord d’une route. Ne sais-tu pas que son royaume n’est pas de ce monde et qu’il t’ouvre la terre promise ?

– Et si tu estimes n’avoir pas la foi, viens quand même l’acclamer. Car si tu cherches humblement la lumière, ton cri rejoindra celui du Christ : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Car, Lui, le Fils éternel du Père s’est plongé dans les ténèbres de l’abandon total. Même l’absence la plus radicale de Dieu n’est pas le dernier mot de tout, depuis qu’elle fut enveloppée par l’amour de Jésus Christ.

Et il arriva, en ce temps-là, que les foules qui marchaient devant Jésus et celles qui suivaient criaient « Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! »