Archives de catégorie : Méditation

sur un aspect de spiritualité : Christ, Vierge Marie, Église dans le monde…

Préparons-nous au pardon mutuel

Préparons-nous au pardon mutuel

MARDI (3e semaine de Carême) Dn 3,25.34-43 – Mt 18,21-35

Ne devais-tu pas, toi aussi, avoir pitié de ton collègue, comme j’ai eu moi-même pitié de toi ? (Mt 18,33)

Préparons-nous au pardon
Préparons-nous au pardon

Le Seigneur a dit : Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs (Mt 9,13). Il n’est donc permis à aucun chrétien de haïr qui que ce soit : personne ne peut être sauvé si ce n’est dans le pardon des péchés et, ceux que la sagesse du monde méprise, nous ne savons à quel point la grâce de l’Esprit peut leur donner du prix.

Que le peuple de Dieu soit saint et qu’il soit bon : saint pour se détourner de ce qui est défendu, bon pour agir selon les commandements.

Bien qu’il soit grand d’avoir une foi droite et une saine doctrine, et que soient dignes de louanges la sobriété, la douceur et la pureté, toutes ces vertus demeurent pourtant vaines sans la charité. Et on ne peut pas dire qu’une conduite excellente soit féconde si elle n’est pas engendrée par l’amour…

Que les croyants fassent donc la critique de leur propre état d’esprit et qu’ils examinent attentivement les sentiments intimes de leur cœur. S’ils trouvent au fond de leur conscience quelque fruit de la charité, qu’ils ne doutent pas que Dieu est en eux.

Et pour devenir de plus en plus capables d’accueillir un hôte si grand, qu’ils persévèrent et grandissent dans la miséricorde par des actes. Si en effet l’amour est Dieu, la charité ne doit connaître nulle borne, car aucune limite ne peut enfermer la divinité.

Pour traduire en actes ce bien de la charité, mes frères, il est vrai que tous les temps sont bons ; et pourtant, les jours que nous vivons nous y exhortent particulièrement. Ceux qui désirent accueillir la Pâque du Seigneur avec la sainteté de l’esprit et du corps doivent s’efforcer avant tout d’acquérir cette grâce qui contient la somme des vertus et couvre une multitude de péchés (1 P 4,8).

Sur le point donc de célébrer le plus grand de tous les mystères, celui où le sang de Jésus Christ a effacé nos iniquités, préparons tout d’abord le sacrifice de la miséricorde. Ce que la bonté de Dieu nous a donné, nous le rendrons ainsi à ceux qui nous ont offensés. Que les injures soient jetées dans l’oubli, que les fautes ignorent désormais la torture et que toutes les offenses soient libérées de la peur de la vengeance !

Que les maisons pénitencières ne retiennent plus personne et que dans les sombres cachots l’on n’entende plus les tristes gémissements des inculpés ! Si quelqu’un détient de tels prisonniers pour un quelconque délit, qu’il sache bien que lui-même est pécheur et, pour recevoir le pardon, qu’il se réjouisse d’avoir trouvé à qui pardonner.

Ainsi lorsque nous dirons, selon l’enseignement du Seigneur : Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés (Mt 6,12), nous ne douterons pas, en formulant notre prière, d’obtenir le pardon de Dieu.

Nous devons aussi montrer une bonté plus généreuse envers les pauvres et ceux qui souffrent de diverses faiblesses, pour que des voix plus nombreuses puissent rendre grâces à Dieu et que nos jeûnes contribuent au soulage¬ment de ceux qui sont dans le besoin.

Aucun dévouement des croyants n’est plus agréable au Seigneur que celui dont ses pauvres bénéficient : là où Dieu trouve le souci de la miséricorde, il reconnaît l’image de sa bonté.

Saint Léon le Grand Sermon 48, 2-5 : Patrologie Latine 54, 299-300. Traduction Orval.

MOIS DE SAINT JOSEPH – Ve JOUR

MOIS DE SAINT JOSEPH – Ve JOUR

La patrie de saint Joseph.

ISIDORE ISOLANO

Saint Joseph -Église de Saint-Vérand (38)
Saint Joseph -Église de Saint-Vérand (38)

« Joseph fut Galiléen de nation : le texte sacré nous apprend que la province de Galilée n’était pas très-éloignée de Jérusalem, et qu’elle était habitée par des Juifs et des gentils.

« En effet, Isaïe parle de la Galilée des gentils au delà du Jourdain, et saint Luc montre qu’elle était habitée par des Juifs, en disant que Joseph vint en Judée, de la ville de Nazareth en Galilée. Il convenait que Joseph eût pour patrie cette province de la Judée, et en voici les motifs :

« D’abord à cause du ministère qui lui était confié, et dont l’objet était l’éducation du Sauveur des Juifs et des gentils, selon cette parole de saint Paul : « Je dis que Jésus – Christ  a été le ministre de la Circoncision, et qu’il a fait aux gentils la grâce d’honorer Dieu. Ensuite, eu égard à la condition particulière du lieu ; car, est- il dit, des Juifs et des gentils habitaient la Galilée. Et cette nation était mal vue des Juifs. Peut- il venir quelque chose de bon de Nazareth ? »

« Remarquons ici que le Seigneur Jésus, dans toutes ses principales actions, a rendu manifeste le but de sa venue en ce monde. Il a voulu naître parmi des hommes pécheurs, vivre avec eux, être crucifié entre des voleurs, faire d’une pécheresse le premier témoin de sa résurrection, montrant ainsi qu’il était venu au monde pour sauver les pécheurs. C’est pour cela qu’il choisit dans la Galilée celui qui devait être considéré comme son père, et qu’il voulut être originaire de ce pays.

« Le sens du mot Galilée est un troisième motif de cette préférence; car il signifie révélation ou transfiguration. On voit combien ce nom convenait à Joseph, qui reçut la révélation du sublime secret de Dieu, à qui les anges annoncèrent que le Verbe existant de toute éternité au sein de Dieu, habitant une lumière inaccessible, et que le monde n’avait jamais vu, aurait pour -patrie un pays nommé Révélation.

« Cette révélation divine ne fut pas transitoire, mais permanente ; car Joseph toucha de ses mains le Verbe caché de Dieu, qui ne cessa de se communiquer à lui par tous ses sens intérieurs et extérieurs, et par son intelligence. Tel est le rapport de cette patrie qui s’appelle Révélation, avec Joseph, qui reçoit passivement la révélation.

« Mais par le canal de Joseph, la Révélation du Verbe de Dieu se fit activement à l’univers entier, car Joseph l’éleva et le garda jusqu’au temps où il devait se manifester à tout le peuple. « Toute chair, dit le prophète David, vit le salut de Dieu. » Galilée signifie aussi transmigration. Ce nom convient également très-bien à la patrie de saint Joseph, auprès de qui la Divinité, revêtue de l’enfance humaine, vint habiter pour être élevée, gardée, protégée.

« Par cette transmigration grandement merveilleuse et incompréhensible, l’esprit de Joseph lui-même passa de l’ignorance humaine à la connaissance des anges, qui sans cesse désiraient contempler la divinité faite humanité; d’une humble condition à une dignité suprême, bien plus grande que celle de tous les Pères de l’Ancien Testament, qui avaient désiré voir, pendant une heure seulement, celui que les regards de Joseph virent pendant l’espace de plusieurs années.

« Il passa de l’ombre à la vérité, la loi, au temps du Christ, n’étant plus que l’ombre des choses futures; de l’ombre de la loi, des figures et des prophéties à la vérité tout entière. Joseph passa encore de la servitude à la liberté, et à une telle liberté , qu’il fut regardé comme le père du Roi suprême. Il passa de la crainte à l’amour; en effet, dès que Joseph eut connu le Verbe de Dieu, il cessa de servir Dieu par la crainte, parce que la charité parfaite chasse la crainte, et donne la liberté des enfants de Dieu.

« Cette transmigration fut plus douce, plus merveilleuse et plus utile à saint Joseph que la transmigration de Jacob de la maison de Laban dans sa patrie, avec ses épouses Lia et Rachel, ses enfants et ses troupeaux ; car dans cette transmigration , Joseph apprit tout à coup à discerner la vie active de la vie contemplative qui sont signifiées par les épouses de Jacob. Il fut mis en rapport avec les anges, et il conduisit avec lui le premier-né de tout l’univers, Notre-Seigneur Jésus.

« La transmigration du peuple d’Israël hors de l’Égypte ne fut pas plus merveilleuse que la transmigration de Joseph. Les Hébreux virent les miracles faits en présence de Pharaon, les eaux de la mer divisées, la manne tombant du ciel, le soleil arrêté, les murs de Jéricho s’écroulant au bruit des trompettes pendant la transmigration de l’Égypte dans la terre promise.

« Mais, dans sa transmigration, Joseph comprit et vit de plus grandes merveilles : parce qu’il savait que celui qui passait pour son fils, devait être le Sauveur du genre humain, l’ange lui ayant dit: « Il sauvera son peuple de ses péchés. » Il savait que, pour le salut du monde, il fallait que Pharaon, c’est-à-dire le démon, fût vaincu avec son armée, par des prodiges et des miracles, et, enfin, submergé dans Peau du baptême.

« Le Christ fut aussi le pain des anges, pain bien plus doux que la manne tombée du ciel, ainsi que Joseph l’éprouva. Cette transmigration est plus excellente que la transmigration de Babylone. Si, dans la 1re, les Juifs rebâtirent la Jérusalem terrestre détruite, dans la 2e, la liberté est apportée au genre humain esclave, une nouvelle Jérusalem descend du ciel, et l’on recommence à relever les murs détruits de la Jérusalem céleste.

« Quoi de plus? Ces autres transmigrations furent terrestres, celle-ci est spirituelle. Dans les autres, on passe d’une nation à une autre; dans celle-ci, de l’homme à Dieu. Celles-là ne profitent qu’à un peuple, celle-ci à toute nation qui est sous le ciel, et non seulement aux nations passées, mais aux présentes et aux futures, et les cieux se réjouissent, le monde se renouvelle, et les anges sont dans l’admiration.

« Mais Joseph naquit et habita dans la ville de Nazareth, quoique, par ses parents, il fût originaire de Bethléem, comme étant de la maison et de la famille de David. C’est ce que nous croyons d’après la conception du Sauveur, et la demeure de Joseph. En effet, la sainte Écriture dit que Joseph habitait Nazareth, et que même il en tirait son surnom : « N’est-ce pas là le fils de Joseph, le charpentier de  Nazareth de Galilée? »

« D’après saint Jérôme, Nazareth a deux significations : d’abord il signifie fleur, tige ou onction, ce qui s’entend du Christ, dont Isaïe a dit : « Une tige sortira de la racine de Jessé, et « une fleur montera de sa racine. » En effet, à l’apparition du Christ, le monde entier fut comme à l’époque de la floraison.

« L’ancienne loi passa comme l’hiver, et le temps arriva du renouvellement de la nature humaine par la sève de la grâce divine, les fruits des dons célestes mûrirent, les sacrements devinrent des remèdes divins, la vanité des choses temporelles privées de leur force s’évanouit devant la bonne odeur des vertus, et  à la place des pécheurs, les justes méritèrent la couronne céleste.

« Ce sont là, vraiment, les propriétés de la fleur, par lesquelles la ville de Nazareth est en rapport avec le Christ, Notre-Seigneur. Nazareth veut encore dire onction ou remède, gardien ou séparation. Cette interprétation convient parfaitement à la vie de Joseph, qui fut toujours pure par sa virginité, son innocence et sa soumission à la loi divine.

« Elle convient aussi à son ministère. Protecteur de la Vierge immaculée, persévérant dans la virginité avec cette divine Reine des cieux, oint de la grâce suprême, brillant d’une merveilleuse pureté, gardien du paradis terrestre, il fut d’abord connu de tous les anges,et ensuite manifesté aux mortels. »

(La somme des vertus de saint Joseph, dédiée au pape Adrien VI, par Isidore Isolano.)

La grâce du baptême

La grâce du baptême

LUNDI (3e semaine de Carême)  2 R 5,1-15a – Lc 4,24-30

Si tu savais le don de Dieu (Jn 4/10)

Baptême du Christ église des pécheurs Landernau
Baptême du Christ église des pécheurs Landernau  ©J.-Daniel Planchot

Le baptême est le sacrement de l’adoption divine et de l’initiation chrétienne. En lui nous découvrons/ comme dans son germe/ le double aspect de «mort au péché et de vie pour Dieu», qui doit caractériser toute l’existence d’un disciple du Christ.

Nous devons souvent du fond du cœur, remercier Dieu de l’adoption divine donnée au baptême : c’est la grâce initiale d’où dérivent pour nous toutes les autres…

Cette reconnaissance doit se manifester par une généreuse et constante fidélité à nos promesses baptismales. Nous devons être si pénétrés du sentiment de notre dignité sur­naturelle de chrétiens que nous rejetions ce qui peut la ternir et ne recherchions que ce qui lui est conforme.

La gratitude est le premier sentiment que doit faire naître en nous la grâce baptismale ; la joie est le second. Nous ne devrions jamais penser à notre baptême sans un profond sentiment d’allégresse intérieure.

Au jour du bap­tême/ nous sommes nés/ en principe, à la béatitude éter­nelle ; nous en tenons même le gage dans cette grâce sanctifiante qui nous y a été donnée ; entrés dans la famille de Dieu, nous avons le droit de participer à l’héritage du Fils unique.

Quel motif de joie plus grand pour une âme, ici-bas, que de penser qu’en ce jour du baptême/ le regard du Père éternel s’est posé sur elle avec amour, et que le Père l’a appelée, en lui murmurant le nom d’enfant à participer aux bénédictions dont le Christ est comblé ?

Enfin et surtout, nous devons laisser aller notre âme à une grande confiance. Dans nos relations avec notre Père des cieux, nous devons nous souvenir que nous sommes ses enfants, par la participation à la filiation du Christ Jésus, notre frère aîné. Douter de notre adoption, des droits qu’elle nous donne, c’est douter du Christ lui-même.

Ne l’oublions jamais : nous avons revêtu le Christ au jour de notre baptême/ ou plutôt nous avons été incorporés à lui ; nous avons donc le droit de nous présenter devant le Père éternel et de lui dire : Je suis ton premier-né (Gn 27,32) ; de parler au nom de son Fils, de solliciter de lui avec une confiance absolue tout ce dont nous avons besoin.

Quand elle nous créait, la Trinité sainte le faisait « à son image et à sa ressemblance » ; quand elle nous confère l’adoption au baptême, elle grave en nos âmes les traits mêmes du Christ.

Et c’est pourquoi, lorsqu’il nous voit revêtus de la grâce sanctifiante, qui nous fait ressembler à son divin Fils, le Père ne peut que nous accorder ce que nous lui demandons, non de nous-mêmes, mais en nous appuyant sur celui en qui il a mis ses complaisances.

Telle est la grâce et la puissance que nous apporte le baptême : de nous rendre, par l’adoption surnaturelle, frè­res du Christ, capables, en toute vérité/ de partager sa vie divine et son héritage éternel : Vous avez revêtu le Christ (Ga 3,27).

Ô chrétien, quand reconnaîtras-tu ta grandeur et ta dignité ? Quand proclameras-tu, par tes œuvres, que tu es de race divine ? Quand vivras-tu en digne disciple du Christ ?

Columba Marmion Le Christ, vie de l’âme, Abbaye de Maredsous, 1933, p. 186 et 203-204.