La Médaille Miraculeuse et le Credo VII

Les douze étoiles : Signes de l’Église, dont Marie est Mère

Vierge_Marie_Assise_Les_Fleurs_Franciscaines_serie2LES DOUZE ÉTOILES

Les étoiles sont le symbole de la communauté complète et parfaite. Elles célèbrent: « La Nouvelle Jérusalem qui descend du Ciel, de Dieu, resplendissante de la Gloire de Dieu » (Ap. 21). C’est la Cité Universelle de tout être qui accepte la Rédemption, qu’il soit ange ou homme…

Au début du Chapitre 12 de l’Apocalypse, Saint Jean note sa vision d’une femme enceinte prête d’accoucher. Il la voit rayonnante – revêtue du soleil, la lune sous ses pieds. Sur sa tête est posée une couronne de douze étoiles. À qui la femme et l’enfant renvoient-ils ?

Dans la Genèse, nous lisons l’histoire de Joseph qui fait un rêve d’une scène similaire. Il dit plus tard à ses frères qu’il a vu le soleil, la lune et onze étoiles pliant le genou devant lui (Genèse 37, 9).

Les représentations du rêve de Joseph renvoient nettement aux membres de sa famille : Israël (le soleil), père de Joseph, de Rachel (la lune), mère de Joseph, et de ses onze frères (les étoiles) (Genèse 37:10). Joseph, dans ce cas, devait être le douzième frère, ou « étoile ». Les douze fils d’Israël engendreront des tribus peuplées et formeront la nation qui deviendra le peuple élu de Dieu (Deutéronome 14, 2).

L’Apocalypse au chapitre 12 bouleverse complètement les éléments du rêve de Joseph. Il les réinterprète en terme de l’Israël spirituel – l’église du peuple de Dieu (Galates 6, 16).

Dans l’Apocalypse, les 12 tribus ne se réfèrent pas à l’ancienne nation, mais symbolisent l’église complète (7, 1-8). La femme revêtue du soleil peut représenter l’église en tant qu’épouse du Christ (2 Corinthiens 11, 2). La lune sous les pieds de la femme et la couronne sur sa tête peuvent dépeindre sa victoire par le Christ.

Mais cette « femme » cosmique d’Apocalypse 12, revêtue du soleil, avec la lune sous les pieds, la couronne à douze étoiles sur la tête, donne naissance au Messie. Du symbole à la réalité, et nous nous trouvons en présence de Marie.

Lorsque Jésus parait au bord du Jourdain, il annonce que le Royaume de Dieu est là. Ce Royaume n’est pas purement spirituel, invisible: il paraît dans un peuple renouvelé, rassemblé, signe d’un monde autre qui commence déjà. Jésus choisit parmi ses disciples les Douze.

Le fait qu’il y ait douze Apôtres annonce le rassemblement de tous les hommes. Car, en Jésus, le salut est annoncé à tous. Parmi les Douze, Pierre reçoit de Jésus– et non des hommes — la responsabilité « d’affermir ses frères » dans la foi. Jésus l’établit comme un roc d’unité: « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise et les portes de l’Enfer ne pourront rien contre elle » (Mt 16, 18).

Le chiffre 12 représente donc l’idée de plénitude et d’achèvement. Il est le symbole de l’élection, de la continuité du nouveau peuple chrétien. Il est aussi le chiffre du peuple de Dieu. Le pain que le Christ-Jésus rompit en douze à la dernière cène, est signe de nourriture matérielle et spirituelle, Jésus étant lui-même le pain de Vie.

L’Apocalypse nous montre la Jérusalem messianique descendant du Ciel. Elle a douze portes gardées par douze anges avec inscrits les noms des douze tribus d’Israël. Elle a douze fondements (assises) portant chacun le nom d’un des douze Apôtres de l’Agneau. Ces assises sont taillées dans les douze pierres précieuses d’Israël. Dans l’Apocalypse chacune des 12 tribus compte 1200 individus qui seront sauvés à l’ouverture du septième sceau. Et, bien sûr, la femme couronnée de 12 étoiles, en qui nous voyons Marie, mère de l’Église, telle qu’elle est représentée par exemple dans la Chapelle de la rue du Bac.

SIGNES DE L’ÉGLISE

Le mot « Église » signifie « rassemblement » et « élection ». Chaque communauté chrétienne primitive se nommait « assemblée d’élus » ou église. La totalité des croyants formait l’Église, au sens général, et non plus local et particulier, de ce mot. Les Apôtres déjà se préoccupaient d’organiser solidement les communautés chrétiennes. Les communautés de l’âge apostolique présentaient les mêmes traits généraux que les communautés chrétiennes modernes : chacune était un groupe de « fidèles », persévérant dans la doctrine des Apôtres, la fraction du pain et la prière (Ac 2,42), sous la présidence d’un intendant (épiskopos, « évêque »), entouré d’anciens (presbyteroi, « prêtres ») et de serviteurs (diakonoi, « diacres »). Ces fonctions subsistent toujours parmi nous.

Mais il ne faut pas concevoir cette échelle de fonctions ou hiérarchie comme constituant une autorité extérieure, transcendante au corps des fidèles. Il n’y a dans l’Église aucune autorité extérieure. Un concile œcuménique lui-même, groupant tous les évêques avec le pape, est l’expression de la conscience religieuse des fidèles.

En présentant l’Église comme objet de foi, le Credo nous rappelle qu’elle n’est pas simplement la réunion des croyants, mais a une place éminente dans l’histoire du salut. Durant son ministère terrestre, notre Seigneur Jésus Christ annonce que lui-même en sera le fondateur (Mt 15,18) et de nombreux textes du Nouveau Testament proclament que le Christ en est le chef (ex. Éph 1,22).

Le terme grec ekklèsia se trouve employé dans l’Ancien Testament pour rendre l’hébreu qahal, qui désigne le rassemblement d’Israël et l’appel de Dieu ; c’est ainsi qu’on lit dans le Deutéronome : « N’oublie pas tous les discours que tes yeux ont vus… le jour où vous vous êtes présentés devant le Seigneur votre Dieu à l’Horeb, au jour de l’Église, lorsque le Seigneur me dit : ‘Assemble(ekklèsiason)-moi le peuple et qu’ils entendent mes paroles’… Et il vous annonça le testament qu’il vous ordonna d’accomplir, les dix paroles, et il les écrivit sur deux tables de pierre… » (Dt 4,9-13).

Le terme qahal-ekklésia se retrouve pour désigner les assemblées solennelles du peuple à Jérusalem. Ce qu’il faut donc retenir, c’est que le terme n’est jamais employé dans un contexte profane ; ceci est conforme à son usage dans le Nouveau Testament et dans l’ancienne littérature chrétienne, aussi bien lorsqu’il désigne telle communauté locale que lorsqu’il désigne l’ensemble des croyants. D’ailleurs on trouve souvent l’expression l’Église de Dieu (ex. 1 Co 1,2).

L’Église est désignée dans le Credo comme étant Une, Sainte, Catholique et Apostolique. Ces caractéristiques de l’Église constituent un tout inséparable, car elles s’appellent l’une l’autre ; tout en étant distinctes, on ne saurait faire abstraction de l’une d’entre elles. Ce n’est pas en vain que saint Cyprien de Carthage intitule son ouvrage dirigé contre les dissidents, De l’unité de l’Église catholique.

Lorsque l’on aborde la doctrine de l’Église, il faut se garder des imprécisions et des notions ambiguës. Deux extrêmes sont à écarter : d’une part une conception trop spirituelle de l’Église qui évacuerait toute la réalité sociale et institutionnelle sous prétexte d’éviter le formalisme, d’autre part un institutionnalisme trop marqué qui prétendrait asservir le domaine spirituel.

UNE

Jésus Christ n’a fondé qu’une Église, à laquelle il a promis assistance et qui est de plein droit la gardienne du message évangélique. Cette affirmation était dans l’antiquité, comme elle l’est encore de nos jours pour les chrétiens restés fidèles à la tradition une vérité certaine. Il ne saurait avoir plusieurs églises puisqu’il ne peut y avoir plusieurs vérités.

Il est vrai que l’on parle quelquefois au pluriel des « Églises » pour désigner les communautés locales, conformément à ce qui était déjà l’usage à l’époque apostolique, mais cela n’implique pas davantage la multiplicité que la célébration en de nombreuses places de la Liturgie eucharistique n’implique une division quelconque du Christ. Il en va tout autrement lorsqu’on emploie le terme « Église » pour désigner des communautés chrétiennes dissidentes ; dans ce cas le terme désigne seulement une société religieuse.

Le symbole de Nicée-Constantinople parle de l’Eglise une. Or il existe dans le monde une multitude de confessions chrétiennes, qui se nomment Eglises. Il n’est pas rare que non seulement ces confessions n’aient aucun lien entre elles, mais encore éprouvent des sentiments d’hostilité les unes envers les autres. L’unité de l’Eglise est-elle ainsi détruite? Et l’Eglise qui était jadis une ne s’est-elle pas morcelée en diverses dénominations qui lui ont fait perdre son unité?

Avant tout il faut dire que l’Eglise, par sa nature, est indivisible et le restera jusqu’à la consommation des siècles. Les ruptures et les schismes, qui furent le contrecoup des hérésies, ne signifient pas que l’Eglise ait été fragmentée, mais plutôt que les hérétiques se sont séparés de l’organisme unique de l’Eglise, perdant ainsi tout lien avec elle. L’hérésie se caractérise par le fait de s’opposer en toute conscience à l’enseignement communément admis de l’Eglise.

Dire que l’Église est une, c’est dans toute la force du terme. Cette unité est d’abord dans le temps : l’Église d’aujourd’hui est dans son essence la même que celle des Apôtres et des Pères des premiers siècles. Elle est ensuite dans l’espace : les Églises locales qui professent la pure foi chrétienne et conservent fidèlement la succession apostolique sont en communion entre elles et ont le même chef, qui est le Christ.

L’Église existe comme rassemblée par le Saint Esprit. « L’Église ne se trouve pas d’abord là où l’on organise, réforme, dirige, mais en ceux qui croient simplement et qui en elle accueillent le don de la foi et en vivent. » (J. Ratzinger, Foi chrétienne…, p. 248.)

L’unité de l’Eglise est conditionnée par l’unité de l’Eucharistie; en dehors de la communion eucharistique, il ne peut y avoir d’unité. « Nous tous qui participons à ce seul pain et à cet unique calice, unis-nous dans la communion d’un seul Esprit Saint », prie-t-on dans la liturgie de saint Basile le Grand. La qualité de membre de l’Eglise s’exprime non seulement dans l’unité de pensée sur le plan dogmatique, mais également dans l’unité de l’eucharistie.

A l’heure actuelle la plupart des Eglises locales prennent part, d’une manière ou d’une autre, au mouvement pour l’unité chrétienne (le mouvement œcuménique) et entretiennent des contacts avec des chrétiens des autres confessions, en particulier celles dont l’ecclésiologie est identique ou proche d’elle.

La première Eglise traitait les hérétiques avec rigueur: non seulement les canons de l’Eglise leur interdisait toute participation à l’eucharistie, mais ils interdisaient également aux fidèles de prier avec les hérétiques. Toutefois, nous devons nous rappeler que les hérésies des premiers siècles du christianisme (Arianisme, Monophysisme) rejetaient les fondements mêmes de la foi chrétienne: la divinité du Christ, l’égalité des personnes de la Trinité, la plénitude des natures divine et humaine du Christ. On ne peut en dire autant de la majorité des confessions chrétiennes d’aujourd’hui, car elles admettent les dogmes fondamentaux de l’Eglise.

Lorsqu’ils abordent la difficile question des divisions du christianisme, les chrétiens peuvent se rappeler que Dieu seul connaît les limites de l’Eglise. Comme disait saint Augustin, « nombreux parmi ceux qui sur terre pensent être étrangers à l’Eglise, verront au jour du Jugement qu’ils en sont ses citoyens; et nombreux parmi ceux qui pensaient être des membres de l’Eglise, seront hélas considérés comme lui étant étrangers ».

Déclarer que, hors de l’Eglise, il n’y a pas de salut et il ne saurait y avoir la grâce de Dieu serait poser des limites à l’omnipotence de Dieu, l’enfermer dans un cadre hors duquel il n’aurait pas le droit d’agir.

SAINTE

Sainte parce que, fondée par le Christ, elle est au service exclusif de Dieu. Elle est la fiancée toute resplendissante, sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et immaculée (Éph 5,27). Clément d’Alexandrie (IIIe S.) écrit : « Si l’on appelle sacré soit Dieu lui-même, soit l’édifice élevé à sa gloire, comment n’appellerait-on pas sacrée par excellence l’Église devenue sainte pour la gloire de Dieu selon la connaissance ? N’est-elle pas le sanctuaire tout à fait digne de Dieu, non pas préparé par le travail des ouvriers, ni orné par la main des artistes, mais édifiée en temple par la volonté de Dieu ? » (Stromates VII,5,23).

L’Église est non pas vue, mais confessée comme sainte parce qu’elle est le lieu dans lequel l’Esprit Saint opère son œuvre de sanctification. Elle ne pourrait pas être sanctifiante si elle n’était pas sainte, dans le plus essentiel de son être. Sainte par sa vocation, l’Église est porteuse de la grâce que l’Esprit ne cesse de verser sur elle depuis le jour de la Pentecôte.

Cette grâce est communiquée à chacun de ses membres par le baptême d’abord, puis par les autres sacrements : la vie dans l’Église est une vie en Christ et rien d’autre, et à cause de cela cette vie est toujours une ascèse qui exclut toute passivité, car il appartient à chacun de réaliser ce qui lui est donné par son appartenance à l’Église Corps du Christ.

CATHOLIQUE

Si en grec, dans la langue profane, ce terme ne signifie rien d’autre qu’universel, il a pris dans celle de l’Église une coloration particulière : la catholicité est un attribut que l’Église possédait alors qu’elle ne groupait qu’une poignée de disciples palestiniens, autant que de nos jours alors qu’elle est répandue dans les cinq continents. La Bonne Nouvelle du salut apportée en Jésus-Christ l’est pour toute l’humanité (Mt 27,19-20).

En lui sont abolies les différences de race et culture, comme l’écrit saint Paul : Aussi bien n’y a-t-il pas de distinction entre Juif et Grec : tous ont le même Seigneur, riche envers tous ceux qui l’invoquent (Rm 10,12). Cette universalité est une plénitude où chaque personne a la possibilité de s’épanouir car l’opposition de la partie et du tout est surmontée dans l’Église, dont la vie reflète celle de la Divinité une et trine à la fois.

La catholicité est aussi la négation du particularisme sectaire ; c’est même cet aspect qui est le plus mis en valeur dans les plus anciens textes patristiques où l’on trouve employé l’adjectif « catholique ». C’est ainsi que l’on trouve dans la suscription du Martyre de saint Polycarpe (IIe S.) la formule : « L’Église de Dieu qui séjourne à Smyrne à l’Église qe Dieu qui séjourne à Philomelium et à toutes les communautés de la sainte Église catholique qui séjournent en tout lieu. »

Au milieu du IIe siècle, à la question du juge, Pionius, martyr à Smyrne (250), répond qu’il est chrétien ; mais cette réponse est jugée incomplète et lorsqu’on lui demande à quelle église il appartient, Pionius répond : « à l’Église catholique ». Le terme de catholique caractérise ici la véritable Église fondée par le Christ. C’est le sens que l’on retrouve invariablement dans les documents conciliaires en particulier dans le décret dogmatique des Pères du premier Concile œcuménique (325).

Le qualificatif « catholique », déterminant de sa nature, exprime donc l’unité dans la diversité : une unité « par le fond », réalisée à travers la participation aux mêmes biens, et confirmée par la reconnaissance mutuelle des membres et des communautés particulières. Concrètement cette unité catholique s’établit par le ministère de l’épiscopat. La communauté (l’Église) se soude autour de son évêque, lui même en communion avec tous les autres, les liens de communion entre les évêques se nouant à leur tour auprès de l’évêque de Rome.

Catholique veut dire universel. Il n’y a sur la terre, malgré la multiplicité des dénominations, qu’une seule Eglise : celle de notre Sauveur et Seigneur Jésus Christ. Ce n’est pas une organisation, mais plutôt un peuple qui transcende les institutions. Tous ceux qui ont placé leur confiance en Jésus Christ, mort et ressuscité en font partie, quelle que soit leur condition sociale, leur nationalité ou la couleur de leur peau.

APOSTOLIQUE

L’Église l’est parce qu’elle est bâtie sur le fondement des apôtres et elle garde fidèlement le message du Seigneur transmis par les apôtres ; en ce sens « apostolicité » est synonyme d’« authenticité ». La continuité matérielle dans la succession apostolique est une condition nécessaire mais nullement suffisante ; les successeurs légitimes des apôtres sont les évêques qui gardent fidèlement la doctrine apostolique.

C’est à eux que revient le droit de proclamer la parole de vérité et d’interpréter la Tradition ; ce sont eux qui, individuellement et collectivement, détiennent le pouvoir d’enseigner (potestas docendi). Les évêques successeurs des apôtres, et les prêtres, leurs délégués, offrent au nom de l’Église la victime sans tache, car à eux s’adresse aussi la parole du Sauveur : Faites ceci en mémoire de moi (Lc 22,19).

Ils ont le pouvoir de lier et de délier et la charge du troupeau spirituel qui leur est confié par Dieu. Il n’y a jamais eu de doute dans l’Église catholique sur le fait que l’épiscopat appartient non pas au « bien-être » [bene esse] ou à la « plénitude » [plene esse] de l’Église mais à sa nature [esse] même. C’est pourquoi saint Ignace d’Antioche va jusqu’à écrire qu’il faut « regarder l’évêque comme le Seigneur lui-même » (Lettre aux Éphésiens V,1).

Cela ne veut pas dire pourtant que l’évêque possède un pouvoir arbitraire, car il doit lui-même être attaché à la Tradition de l’Église et être en communion visible avec l’ensemble de l’épiscopat, uni au Pape, auquel appartient la plénitude du pouvoir, conformément à la structure de l’Église héritée de la communauté apostolique.

D’autre part si, en vertu du charisme doctoral inclus dans la succession apostolique, les évêques légitimes ont la prérogative exclusive d’expliciter officiellement la croyance constamment professée par l’Église et comme corollaire le pouvoir d’excommunier les hérétiques, c’est à tout le peuple chrétien qu’il appartient de défendre la foi contre toute déformation. C’est d’ailleurs dans l’union des pasteurs et de tout le peuple chrétien fidèles au message du Seigneur et à la foi apostolique que se manifeste l’unité catholique de la Sainte Église de Dieu.

Comme nous le rappelait J. Ratzinger, l’Église n’est pas d’abord une organisation. L’épiscopat n’est pas l’institution d’un pouvoir de type purement politique. C’est, comme l’enseigne Vatican II, un sacrement, c’est-à-dire le signe d’un mystère dans lequel opère essentiellement l’Esprit Saint. Aussi bien l’Église peut elle être justement désignée comme communion,  » communion des saints « , ce que nous aborderons la prochaine fois.

L’OEUVRE UNE ET MULTIFORME DE L’ESPRIT

On peut dire que la troisième partie du Symbole décline l’œuvre à la fois une et multiforme de l’Esprit Saint. Dans l’eucharistie, c’est bien par la puissance de l’Esprit Saint que s’opère la conversion des offrandes en corps et sang du Christ, partagés ensuite dans la foi: « Que ce même Esprit Saint, nous t’en prions, Seigneur, dit le prêtre dans la quatrième prière eucharistique, sanctifie ces offrandes; qu’elles deviennent ainsi le corps et le sang de ton Fils, dans la célébration de ce grand mystère que lui-même nous a laissé en signe de l’Alliance éternelle. »

Dans le nouveau rituel du sacrement de pénitence, la rémission des péchés est également attribuée directement à l’Esprit Saint. La formule prononcée par le prêtre est la suivante: « Que Dieu vous montre sa miséricorde. Par la mort et la résurrection de son Fils il a réconcilié le monde avec lui, et il a envoyé l’Esprit Saint pour la rémission des péchés… »

Cette vision d’une Église tout entière édifiée par l’Esprit Saint opérant dans les sacrements n’est pas encore familière à l’ensemble des chrétiens. C’est pourtant la vision de foi, celle que déterminent les formules du Symbole.

Cette Église est a construire avec tous, et en particulier avec ceux qui sont malades, réfugiés, pauvres ou désorientés, c’est- à-dire les plus démunis. A première vue, ils semblent n’avoir rien à nous offrir. En réalité, ils nous sont donnés par le Christ comme ses frères, et c’est à travers eux que nous avons accès au Christ. Même ceux qui possèdent souffrent souvent d’une autre pauvreté : celle de n’avoir rien à donner ni à recevoir…

La communion entre « riches » et « pauvres » est essentielle à l’Eglise en tant que Peuple où Dieu rassemble des hommes de tous âges, de toutes conditions sociales et de toutes races: des hommes qui, normalement, ne seraient pas « frères » s’ils n’étaient fils d’un même Père

TEMPS ET ÉTERNITÉ

L’Eglise vit sur terre, mais elle est tournée vers le ciel, son existence se déroule dans le temps, mais elle respire l’éternité. Le calendrier et tous les cycles liturgiques de l’année, de la semaine, du jour, lui donnent l’occasion d’entrer en contact avec l’éternité. Dans le cycle de l’année l’Eglise commémore et revit toute l’histoire du monde et de l’homme, toute l’économie du salut de la race humaine.

La série annuelle des fêtes déroule devant nous la vie du Christ, de sa naissance à la Crucifixion et à la Résurrection, la vie de la Mère de Dieu de sa conception à l’Assomption, la vie de tous les saints glorifiés par l’Église. Dans le cycle de la semaine et du jour toute l’histoire du salut de l’humanité est également renouvelée et commémorée dans les offices.

La Résurrection du Christ fut un événement déterminant, fondamental, dans l’histoire de la foi chrétienne: « Si le Christ n’est pas ressuscité, notre prédication est vaine, et votre foi aussi est vaine » (I Co 15,14). Si le Christ n’était pas ressuscité, le christianisme n’aurait été rien de plus qu’une de ces nombreuses doctrines métaphysiques à fondement moral et religieux. La résurrection du Christ a posé le point de départ de l’Eglise en tant que vie nouvelle, qu’existence nouvelle humano-divine. Dès les tout débuts de l’histoire de l’Eglise, la fête de la Résurrection du Christ est devenue la pierre d’angle du calendrier chrétien.

Les fêtes ne se limitent pas à la simple commémoraison d’événements survenus dans un passé éloigné. Elles nous donnent accès à la réalité spirituelle de leur origine, qui possède un caractère intemporel, permanent pour nous tous. Tout chrétien reçoit le Christ comme son Sauveur, incarné pour lui, et pour cette raison il s’approprie à travers ses impressions personnelles et à la mesure de ses moyens tous les événements de la vie du Christ.

La fête est l’actualisation aujourd’hui d’un événement qui s’est produit jadis dans le temps et qui se produit toujours en dehors du temps. A Noël nous entendons ces paroles à l’Eglise: « Ce jour Christ naît à Bethléem »; à l’Annonciation: « Ce jour la nature des eaux est sanctifiée »; à Pâques: « Aujourd’hui le Christ, ayant vaincu la mort […] est ressuscité du tombeau ». Ainsi, la communion au Christ ressuscité ne cesse jamais. La Pâque n’est pas seulement un jour particulier de l’année, mais une réalité éternelle, à laquelle nous participons tous les jours.

Le cycle annuel des fêtes est comme un reflet de l’éternité dans le temps. L’Église dans le temps est une icône de l’éternité. De même qu’une icône contient la présence et l’énergie de celui qui est peint sur elle, de même le temps de l’Eglise est remplie de l’énergie éternelle et de la présence du Christ, de la Mère de Dieu, des anges et des saints, dont le souvenir est commémoré tout au long de l’année.

MARIE, MÈRE DE L’ÉGLISE

En promulguant la constitution dogmatique « Lumen Gentium » lors du concile Vatican II, le 21 novembre 1964, le pape Paul VI a déclaré la Vierge Marie « Mère de l’Eglise ».

« C’est à la gloire de la bienheureuse Vierge et à notre réconfort que Nous proclamons Marie très sainte, Mère de l’Eglise, c’est-à-dire de tout le peuple de Dieu, aussi bien des fidèles que des pasteurs, qui l’appellent Mère très aimante, et Nous voulons que, dorénavant, avec un tel titre très doux la Vierge soit encore plus honorée et invoquée par tout le peuple chrétien… » «… Ce titre en vérité appartient à l’authentique substance de la dévotion à Marie, trouvant sa justification dans la dignité elle-même de la Mère du Verbe Incarné. »

La Vierge Marie est Mère de l’Église dans l’ordre de la grâce parce qu’elle a donné naissance à Jésus, le Fils de Dieu, Tête de son Corps qui est l’Église. En mourant sur la croix, Jésus l’a donnée comme mère à son disciple, par ces mots : « Voici ta mère » (Jn 19, 27).

Après l’ascension de son Fils, la Vierge Marie a aidé, par ses prières, les débuts de l’Église et, même après son assomption au ciel, elle continue d’intercéder pour ses enfants, d’être pour tous un modèle de foi et de charité, et d’exercer sur eux une influence salutaire, qui vient de la surabondance des mérites du Christ. Les fidèles voient en elle une icône et une anticipation de la résurrection qui les attend, et ils l’invoquent sous les titres d’avocate, d’auxiliatrice, de secours, de médiatrice.

Son culte de vénération trouve une expression particulière dans les fêtes liturgiques dédiées à la Mère de Dieu ainsi que dans les prières mariales, comme le Rosaire, résumé de tout l’Évangile. En regardant Marie, toute sainte et déjà glorifiée en son corps et en son âme, l’Église contemple en elle ce qu’elle même est appelée à être sur la terre et ce qu’elle sera dans la patrie céleste. (cf. compendium du catéchisme de l’Église Catholique, n°196-199)

Marie est, enfin, la Mère spirituelle de l’humanité tout entière, « car c’est pour tous les hommes que Jésus a donné son sang sur la croix, et c’est tous les hommes que, depuis la croix, il a confiés à ses soins maternels » (Benoit XVI, messe du 1er janvier 2007).