MOIS DU ROSAIRE – jour 26 – Le Rosaire, Oraison mentale
Le Rosaire étant, pour ainsi dire, un livre de méditation, on peut appliquer à la pratique de cette dévotion ce que Saint François de Sales dit, en général, de l’oraison mentale ou méditation.
« Je vous conseille principalement, dit-il, l’oraison de l’esprit et du cœur, et surtout celle qui est occupée de la vie et de la passion de Notre Seigneur (ce qui a lieu dans la méditation des mystères du rosaire); car, à force de le considérer dans l’exercice de la méditation, toute votre âme se remplira de lui, et vous formerez votre conduite intérieure et extérieure sur la sienne. Il est la lumière du monde, c’est donc en lui, par lui et pour lui que nous devons être éclairés. Vous le savez; les petits enfants entendant continuellement parler leurs mères, et s’efforçant de bégayer avec elles, apprennent à parler la même langue: c’est de cette sorte que nous attachant au Sauveur dans la méditation des mystères du rosaire, y observant ses paroles, ses actions, ses sentiments et ses inclinations, nous apprendrons avec sa grâce, à parler comme lui, à agir comme lui, à juger comme lui et à aimer ce qu’il a aimé. »
C’est là l’oraison mentale propre à la récitation du Rosaire et qui, d’après l’intention de l’Église, doit lui être inhérente; et de quel avantage ne doit pas être pour nous cette méditation, puisque nous ne saurions aller à Dieu le Père que par cette porte qui est Jésus-Christ, ainsi qu’il nous l’a dit lui-même.
La glace d’un miroir ne peut arrêter notre vue, à moins qu’elle ne soit enduite d’un côté d’une couche de plomb ou d’étain, de même nous n’aurions jamais pu bien contempler la divinité en celle vie mortelle, si elle ne se fut unie à notre humanité dans Jésus-Christ, dont la Vie, la Passion et la Mort sont pour nos méditations l’objet le plus proportionné à la faiblesse de nos lumières, le plus doux à notre cœur et le plus utile au règlement de nos mœurs.
Le Sauveur s’est appelé le Pain descendu du ciel, pour plusieurs raisons, mais entre autres pour celle-ci: Comme l’on mange le pain avec toutes sortes de viandes, nous devons si bien goûter l’esprit de Jésus-Christ dans la méditation des Mystères du Rosaire, que nous en étant nourris, nous le fassions entrer dans toutes nos actions.
Mais, pour s’en nourrir réellement, il faut mettre en pratique ce que Saint Ignace appelle l’exercice des trois puissances de l’âme; c’est-à-dire que, pour méditer chaque Mystère du Rosaire, nous devons exercer la mémoire, l’entendement et la volonté: la mémoire, en nous remettant devant les yeux le mystère que nous avons à méditer; l’entendement, en recherchant les motifs qui peuvent le plus contribuer à échauffer notre volonté; et enfin la volonté, en lui faisant produire les actes de la vertu qui est le fruit de la méditation du Mystère.
C’est ce dernier point qui est le principal de tous et celui auquel nous devons nous arrêter, parce qu’il est la fin de la méditation, et en outre parce que le fruit qui doit provenir de toutes les réflexions de l’entendement, doit être d’émouvoir la volonté à la recherche du bien et à la fuite du mal.
Cette manière de méditer est très simple et très à la portée de tout le monde. Par le moyen de cet exercice des trois puissances de l’âme, nous nous représentons le sujet du Mystère que nous avons à méditer; nous nous figurons les circonstances du fait comme s’il se passait sons nos yeux; nous réfléchissons sur les particularités qui nous fourniront des motifs propres à exciter les sentiments analogues au fait rappelé dans ce Mystère, et nous nous livrons à ces sentiments, résolus à pratiquer la vertu qui en découle naturellement et dont nous faisons des actes.
Mais il est évident que la volonté étant une puissance aveugle qui ne peut se porter à rien d’elle-même si l’entendement ne la guide, il faut qu’elle soit éclairée par celui-ci pour découvrir ce qu’elle doit ou aimer ou haïr, car nous n’aimons une chose que parce que nous la concevons bonne et digne d’être aimée. Il est donc clair que l’opération de l’entendement est le fondement des autres actes que nous faisons dans l’oraison, et c’est pour cela qu’on l’appelle souvent simplement méditation.
Ce que l’Écriture dit de la méditation de la Loi du Seigneur, peut s’appliquer très-naturellement à la méditation des mystères du rosaire. « Heureux, dit le Prophète royal, heureux l’homme qui médite jour et nuit sur la Loi du Seigneur ! Il sera comme un arbre qui est planté le long des eaux et qui portera son fruit dans sa saison».
« Heureux, dit-il ailleurs, ceux qui réfléchissent sur ses promesses; c’est une marque qu’ils le recherchent de fout leur cœur ». Donne-moi l’entendement, dans la méditation des Mystères du Rosaire, et je ferai de profondes réflexions sur Votre Loi, et je l’observerai de tout mon cœur.
« Que si, dit-il dans un autre endroit, Votre Loi n’eût été le sujet ordinaire de ma méditation, peut-être que je serais demeuré dans mon anéantissement, et que j’y aurais péri »; c’est-à-dire, comme l’interprète saint Jérôme, je serais demeuré dans les peines et dans les misères qui m’environnent. Ce qui doit nous donner encore une haute estime de la méditation, en général, et en particulier de la méditation des Mystères du Rosaire, c’est que les Saints disent qu’elle sert à toutes les vertus et à toutes les bonnes œuvres.
Mais afin que par l’opposition de son contraire, on vienne à la mieux connaître, il faut savoir que le manque de réflexion est une des principales causes de tous les maux qui arrivent dans le monde, suivant ces paroles de Jérémie: « Toute la terre est désolée d’une désolation universelle, parce qu’il n’y a personne qui fasse aucune réflexion dans son cœur ».
Savez-vous pourquoi la terre est si désolée, quant au spirituel ? c’est qu’il parce n’y a presque personne qui rentre en soi-même et qui repasse en son esprit les Mystères ineffables de la religion et les bontés infinies de Dieu.
Or, n’est-ce pas ce désordre que ferait cesser la récitation du Rosaire faite dans l’esprit de l’Église, c’est-à dire en méditant affectueusement les Mystères qui le constituent et qui sont la base de la religion et de la morale chrétienne ?
Qui, en effet, oserait s’éloigner de Dieu, s’il considérait intérieurement et en esprit de Foi et d’amour que Dieu est mort à cause du péché, et que le péché est un si grand mal, qu’il a fallu que Dieu se fit homme, afin , par sa mort, de satisfaire entièrement pour le péché, à la justice du Père éternel ?
Il n’y a point de doute que si nous faisions les réflexions convenables en méditant les mystères du Rosaire, cela nous servirait d’un frein puissant pour nous faire éviter le péché; aussi est-ce pour cette raison que le démon, qui connaît l’utilité de cette méditation bien faite, essaie continuellement de nous en détourner par tous les moyens possibles:
il fait en sorte que nous ne nous servions pas des yeux de fa Foi et que nous croyions comme si nous ne croyions pas, c’est-à-dire sans croire de cœur et d’âme, d’une foi vivante et pratique, afin qu’en voyant, nous ne voyions pas, et qu’en écoutant, nous n’écoutions et ne comprenions pas, faute de réflexions sur ce que nous croyons.
Résolution
Prenons la résolution de nous recueillir et de méditer de notre mieux les Mystères du Rosaire, lorsque nous le récitons: nous pouvons aisément nous convaincre, par notre propre expérience, que la seule manière de le réciter avec fruit, pour la gloire de Dieu et le salut de notre âme, c’est de bien méditer les Mystères afin d’en pénétrer notre esprit et notre cœur. Disons avec l’Apôtre: «Je prierai en esprit; je prierai au-dedans de mon cœur: je chanterai les louanges de Dieu en esprit; je les chanterai au-dedans de mon cœur.»
Prière
Vierge Sainte, parfait modèle des chrétiens ! l’Évangile dit de Vous que vous conserviez dans Votre Cœur et méditiez lus paroles de Votre Divin Fils; nous sommes des enfants qui ne savent pas grand chose relativement à la méditation, ô bonne Mère ! apprenez-nous Vous-même à méditer les Mystères du Rosaire, afin que la pratique de cette dévotion nous rende agréables aux yeux de Dieu en nous rendant des hommes et des femmes d’oraison. Ainsi soit-il.
D’après le manuel de Liège 1847
POUR HONORER SA MÈRE
Par l’effusion de l’Esprit Saint à la Pentecôte, il a donné à ses disciples la force d’aimer et de répandre sa vérité, il a demandé la communion pour construire un monde digne de l’homme racheté et a accordé la faculté de sanctifier toutes les choses dans l’obéissance à la volonté du Père céleste. De cette façon il a allumé dans l’âme de celui qui donne la joie de donner, et dans le cœur du malheureux, la certitude d’être aimé.
Dans la gloire de l’assomption de la Vierge Marie, la première des rachetés, nous contemplons, entre autres, la véritable sublimation des liens du sang et des affections familiales: le Christ, en effet, a glorifié Marie non seulement parce que immaculée et arche de la divine Présence, mais aussi pour honorer sa Mère en tant que Fils.
Saint Jean-Paul II, Osservatore Romano 45, 08-11-1983