EUCHARISTIE MÉDITÉE 3

EUCHARISTIE MÉDITÉE 3

Le roi de la paix

Dites à la fille de Sion : Voici votre Roi qui vient à vous plein de douceur. (Zach. IX, 9)

Eucharistie- Motif sculpté sur porte d'église - Bruxelles
Eucharistie- Motif sculpté sur porte d’église – Bruxelles

3e Action de grâces – figure de la royauté de Jésus.

Qu’elle est douce, qu’elle est profonde, ô Jésus, mon Sauveur et mon Roi, la paix que votre présence adorée vient de répandre dans mon âme ! Ah ! cette paix, c’est celle de vos tabernacles, c’est la vôtre,  ô Jésus ! Oh ! que l’air qu’on respire auprès de votre cœur est pur !

Là ne parviennent pas les exhalaisons de celui du monde ; le bruit de ses vaines agitations, de ses mille passions vient mourir à vos pieds. Auprès de vous tout est calme, tout est paisible ; le cœur s’y repose avec délices, heureux de pouvoir oublier un instant les fatigues et les peines de la vie.

Vos autels, ô mon Dieu, votre table sainte, voilà bien les jalons que votre main miséricordieuse a placés sur la route du pauvre voyageur de la terre. C’est là qu’il peut s’abriter un instant contre la chaleur du jour de la vie, se reposer en paix et re­prendre des forces pour continuer son voyage.

C’est là encore l’oasis sacrée où votre amour fait jaillir pour lui la source d’eau vive qui le désaltère et le rafraîchit, là enfin ce lieu de re­pos où vous lui envoyez ce sommeil divin qui calme toutes les puissances de l’âme et apaise tou­tes ses douleurs.

Oh ! soyez béni, Seigneur, pour ce don au-dessus de tout don, pour ce bienfait au-dessus de tous les bienfaits ; inspirez-moi des hymnes nouvelles pour bénir votre Eucharistie ; apprenez-moi de nouvelles paroles pour la louer, pour en parier dignement ; apprenez-moi la langue qu’on parie au ciel ; mais surtout, pour l’aimer, agrandissez mon cœur, doublez, centuplez ses fa cultes aimantes ; que l’amour soit mon aspiration, ma respiration, mon élément, ma vie.

Qu’ils sont beaux, Seigneur, les jours passés à l’ombre de votre sanctuaire ! Qu’elles sont courtes les heures qui s’écoulent en votre présence ! Qu’elle est ravissante votre conversation, ô bien-aimé !

Mais pourquoi faut-il quitter le ciel pour retourner à la terre ? Pourquoi faut-il, après avoir entendu votre voix, entendre encore celle des créa­tures ? Oh! quand donc viendra pour moi l’éternelle communion ? Quand sonnera-t-elle cette heure fortunée qui consommera dans la vraie patrie l’u­nion commencée ici-bas?

Ce bonheur, ô mon Dieu, cette paix inaltérable, ‘je ne l’ai pas encore méritée ; il faut l’acquérir par des combats, par des sacrifices ; il faut, avant de régner avec vous dans la gloire, mériter la cou­ronne promise seulement à la vertu et au courage.

Ah ! restez avec moi, Seigneur, pour affermir mon bras et me rassurer ; ne me quittez pas ; voyez les dangers qui m’environnent, les périls qui me menacent ; la voix des passions est encore puissante au fond de mon cœur, et cette voix trop souvent trouve un écho dans mes penchants secrets, dans mes affections intimes.

Prenez pitié de ma misère, ô Jésus, mon Sauveur et mon Roi, voyez ce que je suis sans vous ; vous le savez, un fragile roseau qui plie et se brise au premier souffle de la tempête. Sans vous, ô ma force et ma vie, la douleur m’abat, l’épreuve me décourage, et le calme m’endort dans une fausse et coupable sécurité.

Laissez-moi, oh ! laissez-moi désormais me reposer et m’endormir entre vos bras. Assez d’orages ont passé sur ma vie, assez de douleurs ont flétri mon cœur, assez d’épines l’ont déchiré ; il a besoin, ce cœur, de paix et de repos, et ce repos il ne veut plus le chercher et le prendre qu’en vous : ailleurs est trouble, fatigue, déception.

Et vous, ô Marie, notre espérance, notre sœur aimante, colombe mystérieuse qui portez entre vos mains non plus le rameau d’olivier, sym­bole de la paix, mais Jésus, auteur et consomma­teur de la paix véritable, ah! intercédez sans cesse pour nous près de la justice de Dieu, près du Seigneur son Fils, qui est aussi le vôtre, ce Fils adorable, frère et caution de l’homme pécheur.

Touchez en notre faveur les entrailles de sa miséricorde; dites, oh! dites à Jésus que vous êtes aussi notre Mère, afin qu’il abaisse sur nous des regards pleins de clémence, et que son cœur nous envoie, par le canal du vôtre, la lumière qui convainc, la grâce qui touche et la paix qui vivifie. Ainsi soit-il.

Léonie Guillebaut

Jetez le filet à droite de la barque.

Jetez le filet à droite de la barque.

MERCREDI DE PÂQUES

Sené (56) Vitrail pêche miraculeuse
Sené (56) Vitrail pêche miraculeuse

Le Christ ressuscité est doué d’ubiquité, une des qua­lités des corps glorieux. Il surprend partout ses disciples. Le voilà près de la mer de Tibériade où sa troisième manifestation est aussi . impressionnante que les deux premières. Elle nous permet de méditer : 1° Pêche infruc­tueuse. 2° Pêche fructueuse.

1° Pêche infructueuse. — Elle est symptomatique la parole de Pierre qui décide six de ses compagnons à aller reprendre leur ancien métier: «Je m’en vais pêcher ! ». Ne sent-elle pas un peu le découragement ?

Les événe­ments furent tragiques, on ne sait pas bien ce qui va se passer ; les rêves se sont effondrés d’une   messianité temporelle ; puis, il n’y a plus de bourse commune, il faut bien gagner sa vie ; allons pêcher. Ils y vont et ne sont pas heureux, ils ne prennent rien.

Le Maître nous a tous faits, dans une certaine mesure, pêcheurs d’hommes. Pour- un très grand nombre d’entre nous, la pêche, du moins en apparence, est infructueuse. Bien n’a réussi dans les œuvres entreprises, les sacrements sont de moins en moins fréquentés, l’église de plus en plus abandonnée. D’où cela vient-il ?

Regardons nos dispositions : défaut de foi à notre mission, à la grâce qui l’accompagne ; désenchantement, dépit devant les insuccès. On avait des illusions, elles tombent, le ressort manque. C’est donc que les intentions n’étaient pas droites, uniquement surnaturelles, que la charité n’était pas pure, pas vivante ; nous avons travaillé dans la nuit.

Grave avertissement de la conscience : Jésus n’était pas là comme il devait l’être, seul conseil, seul moteur, seule fin des activités : « Cette nuit-là ils ne prirent rien ». Une preuve douloureuse et trop fréquente : tel ne fait rien à son poste ; il y est remplacé par un autre qui, à la même place, fait merveille. N’accusons donc pas le champ, mais celui qui le cultivait, s’il fut improductif.

O Maître, qu’ai-je fait depuis que je suis à votre service, depuis que je suis dans la situation que j’occupe ? Préservez-moi de l’inertie, de l’infécondité, ne permettez pas que je rende vos dons inutiles.

2° Pêche fructueuse. — Dociles à la parole du Christ les apôtres jettent le filet à droite, « et bientôt après ils ne pouvaient plus le tirer à cause de la multitude des pois­sons ». Alors, ils reconnaissent le bon Sauveur, qui leur a préparé à déjeuner : « Venez et mangez ».

Le pêcheur heureux travaille dans le plein jour de la foi, de la docilité, de la discipline. Ainsi, dans la volonté de Dieu, et ne cherchant que lui, il est assuré de son secours, il est certain de l’efficacité de ses efforts. Il peut le cons­tater par les succès visibles de son labeur, il peut ne pas s’en rendre compte, mais il ne doit pas douter du bien accompli.

Le bien que l’on voit n’est pas souvent celui qu’on réalise vraiment ; l’action la  plus profonde est invisible, mystérieuse. Dès lors qu’on a fait ce qu’on devait comme on le devait, avec humilité et amour, incalculables sont les résultats.

Si tout seuls les anges les constatent, c’est une bénédiction, car, de la sorte, l’amour-propre ne dissipe aucun mérite. Et que, se donnant de plein cœur, on ne craigne pas ce qui arrivera. L’âme de l’apôtre sera toujours réconfortée, soutenue, opportunément, Celui pour qui il a travaillé est là ; à l’heure utile il lui dira aussi : « Venez et mangez ».

Puissé-je, ô Jésus, être un pêcheur heureux. Tel je serai dès lors que ce sera sous votre regard et selon vos indica­tions que je jetterai le filet. Vous êtes toujours là, je le sais ; moi aussi, je veux toujours’ être là.

Mgr Augustin Gonon, évêque de Moulins (+14 avril 1942)

Touchez et voyez : un esprit n’a ni chair ni os.

Touchez et voyez : un esprit n’a ni chair ni os.

MARDI  DE PÂQUES

Le Christ ressuscité parmi les apôtres église Apostoli Santi Venise
Le Christ ressuscité parmi les apôtres église Apostoli Santi Venise

Durant les jours qui suivirent sa sortie du tombeau le Christ s’appliqua à fortifier la foi de ses apôtres à ce grand miracle. Dans l’apparition rapportée aujourd’hui, il leur procure la preuve que Thomas -l’incrédule récla­mera lui-même, l’ostension de ses blessures. Ainsi il les amène à croire : 1° A sa résurrection, 2° A notre résur­rection.

Résurrection du Christ.

— Il se tient tout à coup au milieu des disciples réunis au Cénacle, portes et fenêtres closes. Est-ce lui, est-ce un fantôme ? Fantôme, non, puisqu’il a un corps tangible, puisqu’il mange et boit. Lui, pourtant, puisqu’il parle avec la même voix, avec la même expression de visage que naguère. Indu­bitablement il s’est évadé de la matière, il la domine, son corps est spiritualisé.

Et afin que ses auditeurs émus comprennent bien le mystère de la vie par la mort, il leur répète la leçon donnée hier aux deux pèlerins d’Emmaüs . « II fallait que le Christ souffrit et qu’il entrât dans la gloire » ; on ne va à la gloire que par là souffrance. -De son martyre, ils ont la vision en ses cicatrices.

Au. sujet de celles-ci, saint Thomas écrit : « Il convenait que l’âme du Christ ressuscité, prît son corps blessé: pour la gloire du Christ lui-même ; pour fortifier dans la foi le cœur de ses disciples ; pour qu’en priant pour nous son Père, il lui montrât toujours de quel genre de mort il avait souffert pour l’humanité ; pour que, à ceux qui sont miséricordieusement rachetés par sa mort, il fasse comprendre qu’ils doivent porter les signes de cette mort. »

Dans notre croyance à la résurrection de notre Maître, nous devons puiser l’énergie de marquer en notre âme, sinon sur notre chair, nos efforts pour le glorifier, le faire aimer, lui conquérir des âmes.

Seigneur, je suis de ceux dont vous avez dit : « Bienheureux ceux qui ne verront pas et croiront » ; fortifiez ma foi et augmentez ma générosité.

Notre résurrection.

— Elle trouve son principal argument dans celle de Jésus. C’est l’avis de saint Paul : « Maintenant que le Christ est ressuscité des morts, il est les prémices de ceux qui se sont endormis. Car, puisque par un homme est venue la mort, c’est par un homme aussi que vient la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même aussi tous seront vivifiés dans le Christ. » (1 Cor., 15, 20).

Cette pensée de la résurrection de la chair consolait le saint homme Job : « Je sais que mon Rédempteur est vivant et au dernier jour je ressusciterai de la terre et, dans ma chair, je verrai mon Dieu. » (Job., 19, 25). C’est la conclusion de l’intelligence du corps mystique : où est le chef, là sont les membres.

Peut-être n’y pensons-nous pas suffisamment, et ainsi nous n’y puisons pas ce que nous y pourrions trouver d’encouragement à nos efforts nécessaires d’austérité, de mortification. En contemplant Jésus dont la victoire sur la mort est le principe et le modèle de la nôtre, nous saurions mieux apprécier la fausseté des biens d’ici-bas et nous mépriserions plus facilement les appels perfides ,du sensualisme.

C’est un devoir d’adapter tout notre être à sa gloire future, et donc, en ce qui concerne le corps, de tendre à le spiritualiser. L’apôtre nous instruit ; encore :  « Semé dans la corruption, le corps  ressuscite incorruptible ; semé dans l’ignominie, il ressuscite glorieux ; semé dans la faiblesse, il ressuscite plein de force ; semé corps animal, il ressuscite corps spirituel. » (1 Cor., 15, 42).

Quelle folie, dès lors, d’être l’esclave de ses sens ! « Intense, ce que tu sèmes ne reprend pas vie s’il ne meurt pas avant. » (Ibid., 36). La grâce de Pâques nous est un puissant appel à une vie d’idéal, à un travail confiant d’élévation de nos pensées et de nos intentions.

Seigneur, je vous adore en votre triomphe, et je pense qu’il sera le mien. Mon âme est remplie d’actions de grâces, elle est pleine de joie. Rappelez-moi cet aboutisse­ment de toutes mes peines, afin que ma volonté ne faiblisse jamais.

Mgr Auguste Gonon, évêque de Moulins  (+14 avril 1942)

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