LE MOIS DES FIDÈLES DÉFUNTS – 18 novembre
Selon LE MOIS DE NOVEMBRE CONSACRÉ AU SOUVENIR DES ÂMES DU PURGATOIRE par des considérations sur les peines qu’elles y souffrent, les motifs et les moyens de les soulager et sur l’utilité de la pensée du purgatoire. – L. Grandmont Liège 1841
Quels sont les différents moyens de soulager les morts ?
Le Dieu de miséricorde a établi une alliance de prières et de bonnes œuvres entre tous les membres de son Église, dans le ciel, sur la terre et dans le purgatoire: c’est la communion des Saints que proclame le Symbole des Apôtres.
En vertu de cette union nous pouvons soulager nos frères souffrants dans le purgatoire ; le Seigneur a pour agréable tout ce que nous faisons en leur faveur, il l’accepte comme une dette payée ; il est satisfait, il se relâche des droits de sa justice en voyant la charité qui nous anime pour demander grâce les uns pour les autres.
C’est un père que l’amour filial désarme en faveur d’un enfant coupable, lorsqu’il est sollicité par ses autres enfants. Économie admirable, de la justice et de la clémence divine !
Le grand-prêtre Aaron, voyant que Dieu, irrité contre son peuple, avait fait sortir des entrailles de la terre un feu dévorant qui en avait fait périr plus de quatorze mille, courut au milieu du peuple, que le feu continuait d’embraser, offrit l’encens à Dieu, et, se tenant debout entre les morts et les vivants, il pria pour le peuple, et la plaie cessa.
Exemple admirable qui doit exciter notre zèle et notre piété, puisque les lumières de la foi nous montrent une multitude innombrable d’âmes dans le purgatoire qui n’ont ni sacrifice, ni prêtre, ni autel pour offrir l’encens à Dieu.
Sur la terre un pécheur peut, avec la grâce du Seigneur, secouer et briser les fers dont le péché l’accable : mais les âmes du purgatoire ne peuvent rien ni par elles-mêmes, ni par le secours de la grâce ; elles ont besoin de notre ministère pour sortir de leur prison ; c’est à nous de les délier, de les élargir.
Les laisserions-nous dans un si grand besoin sans nous empresser de les en tirer ? Songeons que leurs chaînes sont de feu, et que, par conséquent, il n’y a point de temps à perdre pour les leur ôter. D’ailleurs ne serait-ce pas la plus insigne ingratitude de notre part, de ne pas répondre aux vues miséricordieuses de notre Père célestequi nous donne le pouvoir de satisfaire pour elles? Quel pouvoir ! Le mépriserions-nous !
Nous contribuons en deux manières à la délivrance des âmes du purgatoire ; par voie d’intercession et par voie de satisfaction. La première manière renferme le saint sacrifice de la messe et la prière : car tout le corps mystique de l’Église peut réunir son intercession commune en faveur des morts, et il le fait dans le saint sacrifice de la messe.
Chaque membre de l’Église peut aussi employer séparément son intercession pour les morts ; et c’est ce qui arrive lorsque quelqu’un en particulier adresse pour eux des prières au Père des miséricordes.
La seconde manière de soulager les morts, c’est-à-dire par voie de satisfaction > renferme le jeûne et l’aumône. Par le jeûne, et par tout ce qu’on appelle les pénitences afflictives, nous pouvons diminuer la peine que doivent les morts à la justice divine; et par l’aumône, nous pouvons la racheter, cette peine.
Cependant ces compensations ne sont acceptées de Dieu que par manière de suffrage, ainsi que s’exprime l’Église, parce qu’il n’y a pas de proportion entre les peines qu’impose aux morts la justice divine, et celle qu’elle accepte en échange de la part des vivants.
La justice divine ne condamne les hommes en ce monde qu’à de légères peines : Maintenant il ne punit pas les crimes dans sa sévérité (Job). Dans l’autre vie, Dieu exerce sa justice avec rigueur : « Je vous dis en vérité, vous ne sortirez point de là que vous n’ayez payé jusqu’à la dernière obole » (Mattieu).
C’est donc toujours une grâce quand le Seigneur reçoit les peines de cette vie pour compenser les peines de l’autre vie. Il n’a pas coutume de rejeter cette compensation ; mais il est en droit de le faire. Il ne nous reste donc que de prier avec instance qu’il veuille bien ne la point refuser.
Voilà pourquoi les saintes Écritures ne nous disent rien de plus, sinon de prier pour les morts : tout ce que nous faisons pour eux se doit rapporter là. Ainsi jeûnons, mortifions notre chair, faisons l’aumône, mais prions toujours en même temps la miséricorde du Seigneur, afin qu’elle daigne agréer ces offrandes, si inférieures aux dettes dont nous sollicitons la remise pour nos frères.
Surtout unissons nos offrandes et nos prières au sang de Jésus-Christ qui demande beaucoup plus efficacement que nous. Une des vertus de ce sang adorable est d’ouvrir les prisons à tant d’âmes enchaînées que dévore une soif ardente de voir Dieu, et que l’impuissance de se délivrer par elles-mêmes retient dans les fers. « C’est vous qui, par le sang de votre alliance, avez fait sortir les captifs du fond du lac qui était sans eau» (Zach.)
N’oublions pas que, quoique les Fidèles condamnés au purgatoire soient morts dans la grâce, il s’en trouve néanmoins parmi eux qui ont négligé de prier pour les morts, et qui, par rapport à eux-mêmes, ont mieux aimé remettre après la mort à satisfaire pour leurs péchés, que d’y satisfaire pendant h vie. Par cette conduite ils ont mérité que le Seigneur leur refuse la grâce qu’il accorde aux autres, en considération de nos prières.
Si nous voulons donc soulager ces morts, il faut prier pour eux avec plus d’instances, parce qu’ils sont bien plus indignes d’avoir part aux trésors de miséricorde que Dieu dispense dans le purgatoire, que les âmes qui furent autrefois, et plus miséricordieuses envers les autres, et plus précautionnées pour elles-mêmes.
RÉSOLUTION.
Puisque l’intérêt de Dieu, celui des âmes souffrantes et le nôtre nous font une obligation de prier pour les morts, prenons la résolution dé nous éclairer sur la manière de remplir avec le plus de fruit cet important devoir. Pensons souvent à cette qualité de sauveurs que Dieu daigne nous accorder, et usons de ce pouvoir qui nous procurera d’abondantes bénédictions, en même temps qu’il apportera d’indicibles soulagements aux âmes du purgatoire.
PRIÈRE.
Je vous rends mille actions de grâce, ô mon Dieu ! de nous avoir accordé le pouvoir de soulager nos frères souffrants par des moyens si faciles.
Nous ne pouvons mieux exprimer notre reconnaissance, Seigneur, qu’en faisant usage de ce pouvoir ; qu’en exerçant la qualité glorieuse de buveurs, que vous daignez nous faire partager avec votre divin Fils, par les seuls mérites duquel nos œuvres peuvent vous être agréables et apporter du soulagement aux âmes du purgatoire. Gloire à Dieu et à Jésus-Christ pour tous les bienfaits dont est comblée la sainte Église ! Amen
Exemple.
Nous n’avons jusqu’à présent rapporté aucune des nombreuses révélations concernant le purgatoire que racontent des écrivains respectables.
Mais nous lisons dans la vie de saint Thomas d’Aquin un fait rapporté par un auteur contemporain, et qui ne peut étonner dans la vie d’un Saint comblé de tant de faveurs extraordinaires ; nous allons le copier parce qu’il est extrêmement propre à nous prouver combien nous pouvons aisément soulager les âmes du purgatoire, si nous sommes persévérants à intercéder pour elles.
Un jour que saint Thomas répandait dans l’oraison son âme devant Dieu, avec autant de confiance que d’humilité, sa sœur, morte depuis peu abbesse de Sainte-Marie de Capoue, lui apparut pour lui apprendre qu’elle était en purgatoire, et le prier de l’aider par ses sacrifices à satisfaire à la justice de Dieu.
Le Saint le fit ; il ajouta plusieurs mortifications aux prières qu’il offrit et qu’il fit offrir pour elle. Après quelques jours sa sœur se montrant à lui une seconde fois, l’assura qu’elle était déjà dans la gloire, et le remercia de ce qu’il avait fait pour lui en avancer la possession. Il lui demanda quel était l’état de ses deux frères déjà morts. Elle lui répondit qu’un des deux était en paradis, et l’autre encore dans le purgatoire.
Saint Thomas demeura d’autant plus consolé, qu’il y avait longtemps que l’incertitude du salut de ses frères affligeait sensiblement son cœur. Depuis leur mort il n’avait cessé de solliciter la divine bonté de lui faire connaître quel était l’état de ces âmes, pour lesquelles il offrait tous les jours les saints mystères.
Dieu voulut bien marquer, par une double faveur, combien ses prières et sa charité lui étaient agréables, puisqu’il lui avait déjà accordé le salut d’un de ses frères, et qu’il lui envoyait sa sœur pour l’en assurer.
Cette sœur, qui lui apparut, était la même qui, s’étant chargée de le détourner d’entrer en religion, fut persuadée par son frère d’y entrer elle-même. Ainsi la charité fraternelle de saint Thomas procura un double avantage à sa sœur en l’arrachant pendant sa vie aux vanités du siècle, et en lui abrégeant les peines du purgatoire après sa mort.
Indulgence applicable aux morts. -Indulgence quand on récite avec dévotion et un cœur contrit une des prières pour les âmes du purgatoire, pour tous les jours de le semaine, en y ajoutant un Pater, un Ave et le Psaume De Profundis. ( Rescrit du 18 Novembre 1826.)