LE MOIS DES FIDÈLES DÉFUNTS – 27 novembre
Selon LE MOIS DE NOVEMBRE CONSACRÉ AU SOUVENIR DES ÂMES DU PURGATOIRE par des considérations sur les peines qu’elles y souffrent, les motifs et les moyens de les soulager et sur l’utilité de la pensée du purgatoire. – L. Grandmont Liège 1841
La pensée du purgatoire nous prouve la folie de ceux qui ne travaillent pas à l’éviter, en expiant leurs péchés en ce monde.
Quel est celui qui pourrait sans frémir se voir exposé à la torture, aux chevalets, aux ongles de fers, aux grils ardents, aux huiles bouillantes et aux autres supplices inventés par des tyrans persécuteurs, par les suggestions infernales des ennemis de la vérité et de la vertu? L’horreur de ces tourments fait trembler les hommes et les porte à supplier Dieu de les en préserver.
Mais parce que l’apôtre saint Paul annonce que celui dont l’ouvrage sera brûlé ne laissera pas d’être sauvé, quoiqu’en passant par le feu, l’on s’inquiète peu d’y passer, d’y rester même un temps proportionné au peu de cas qu’on en fait. O stupide insouciance! ô aveuglement dont les suites sont si déplorables ! Car enfin ce feu sera incomparablement plus insupportable que tout ce qu’on peut souffrir en ce monde.
« Eh quoi ! s’écrie saint Bonaventure, vous ne sauriez maintenant endurer patiemment les moindres atteintes de la douleur ; que ferez-vous donc, quels seront vos regrets, vos lamentations, quand vous vous verrez livrés à cet effroyable incendie, totalement absorbés dans cet abîme de douleurs? »
Ces réflexions toutes simples de saint Augustin et de saint Bonaventure conviennent encore aujourd’hui à un nombre presque innombrable de Fidèles, vivant, il est vrai, dans la crainte de Dieu, mais dans une crainte trop bornée à quelques égards. Ils ont peur de tenter, on le voit; quand au purgatoire, il ne paraît pas qu’ils en aient la moindre appréhension.
Pourvu que je sois sauvé, dit-on, je ne m’inquiète pas du traitement fait à mon âme au moment de la séparation de son corps. Pesons bien tous ces termes ; ils méritent attention. Quoi ? vous ne vous inquiétez pas si Dieu, par un jugement rigoureux, vous exclut de sa vue béatifique pour de longues années, pour des siècles peut-être!
Ah! c’est que vous ne comprenez pas encore en quoi consiste le bonheur de jouir de la vue de Dieu, vous n’avez pas la plus petite idée de l’empressement avec lequel l’âme, dégagée de ses liens terrestres, se portera vers son Créateur, son centre unique, sa dernière fin, son vrai tout; vous ne songez pas qu’un seul instant de la pure jouissance du Souveraine-Être, au séjour de sa gloire, vaut mieux que mille ans dans un paradis terrestre.
Avez-vous jamais éprouvé une seule étincelle de la divine charité dont la flamme dévore l’âme du juste en l’autre vie où elle est consommée? qu’auraient pensé les Saints du langage de ces chrétiens si insouciants sur le délai de la vision intuitive d’un Dieu en trois personnes?
Ignorez, vous donc que, comme dans l’enfer, la peine du dam est incomparablement plus intolérable que celle du sens, ainsi dans le purgatoire, la privation de Dieu, quoique passagère, est sans contredit plus cruelle, plus douloureuse que toutes les autres expiations de ce lieu de souffrance.
La peine d’une âme faite pour posséder Dieu, et qui s’en voit repoussée, éloignée jusqu’à un terme qu’elle ignore, et qu’il n’est plus en son pouvoir de rapprocher, ne souffre aucun parallèle, parce que rien dans la nature । ne ressemble au bonheur infini qu’elle voit qu’elle touche et qui lui échappe.
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Vous ne vous inquiétez pas du traitement fait à votre âme au moment de la séparation de son corps ! Y pensez-vous ? Si vous n’avez pas assez de foi pour pressentir l’effet du délai plus ou moins long de la félicité suprême, peut-être serez-vous plus affecté des peines sensibles qu’il faut subir dans ces prisons de la justice divine.
En conséquence, je vous le demande : voudriez-vous, pour l’empire de l’univers, souffrir seulement pendant un jour, le feu qui dévore les réprouvés, ce feu allumé par la colère du Dieu des vengeances contre ses ennemis : ce feu dans lequel sont rassemblés, réunis, concentrés tous les maux, toutes les espèces de tortures?
Or le feu du purgatoire est le même ou de même nature que celui de l’enfer: comment ne pas trembler à la seule pensée d’un si horrible tourment ?
Mais admirez la bonté de Dieu ; il connaît votre insouciance, votre peu d’inquiétude sur le traitement qui sera fait à votre âme; il daigne en quelque sorte s’en inquiéter lui-même pour vous li sait combien il vous importe de prévenir les jugements de sa justice. Ce n’est qu’à regret que sa miséricorde infinie consent à porter au juste des coups si terribles.
Aussi réfléchissez un instant : sans cesse ici-bas sa tendresse vous sollicite, vous presse d’épargner à son cœur plus que paternel la douleur de vous punir ; et vous l’y forcez par votre indifférence pour son amour, par votre insensibilité sur vos propres intérêts.
En vain est-il plus jaloux que vous- même de hâter votre bonheur ; en vain sa miséricorde vous fournit-elle cent moyens d’acquitter promptement vos dettes sous son règne si doux, si favorable ; en vain sa grâce toujours : prévenante offre-t-elle à votre discrétion l’immense trésor des mérites du Rédempteur.
En vain sa sainteté incompatible avec les moindres taches de l’âme vous engage-t-elle par les avertissements de l’Esprit sanctificateur à vous purifier de tout ce qui peut ternir l’éclat de votre innocence baptismale à faire pénitence de vos péchés; en vain son incompréhensible bonté attache-t-elle sa gloire à vous couronner au plus tôt dans les cieux.
Dur envers vous-même, vous vous refusez aux empressements d’un Dieu, et vous l’obligez, pour ainsi dire, de comprimer ou de retarder les effusions de son amour. Ah ! la mort vous apprendra combien dans l’autre vie il en coûte d’avoir si mal répondu aux avances, aux promesses de l’amour le plus généreux, d’avoir négligé de satisfaire en ce monde à la justice divine.
Satisfaction qui vous est si aisée, si courte ; puisqu’une larme, qu’une sincère pénitence nous fait verser, peut effacer tous nos péchés, tandis que la pénitence de l’autre vie est longue et pénible. Laquelle des deux préférez-vous embrasser? Se décider pour la seconde, que la justice divine exige dans le purgatoire, n’est-ce pas une véritable folie ?
RÉSOLUTION.
Satisfaites dès à présent à la justice divine plutôt que d’attendre à le faire dans ce douloureux séjour d’expiation. Dites avec saint Augustin : « Mon Dieu, brûlez, coupez, tranchez, purifiez-moi en cette vie, pourvu que vous me pardonniez en l’autre » Obtenez ici-bas par le moyen si facile des bonnes œuvres les dettes qui vous coûteront tant à acquitter dans le purgatoire.
PRIÈRE.
Les cieux mêmes ne sont pas purs en votre présence, ô Dieu de toute sainteté ! rien de souillé ne peut y entrer.
Accordez-moi donc la grâce, Seigneur, de travailler à purifier mon âme par la pénitence, la soumission, la résignation dans les peines de la vie, par la pratique des bonnes œuvres : que j’évite avec le plus grand soin les moindres fautes qui pourraient me retenir dans le séjour des souffrances, afin que le moment de jouir éternellement de la vue de mon Dieu ne soit pas retardé. Ainsi soit-il.
Indulgence applicable aux morts. — Indulgence chaque fois que l’on visite le saint Sacrement exposé dans une église, pendant les prières de quarante heures, avec le cœur contrit et la ferme résolution de se confesser, pourvu que l’on y prie pendant quelque temps selon les intentions de l’Église.
Indulgence pour ceux qui visiteront de même le saint Sacrement, exposé pendant les prières de quarante heures, après s’être confessés et avoir communié, et y prieront selon les intentions de l’Église.
La même indulgence est accordée pour la visite du saint Sacrement les Jeudi et Vendredi-Saint.
Brefs du-25 Novembre 1592 et du 10 Mai 1606. — Rescrits du 7 Mars 1815 et du 12 Mai 1817.)